Jean-Claude Gaudin est-il président ou pas de la métropole Aix-Marseille-Provence, qui a officiellement vu le jour le 1er janvier ? Le tribunal administratif de Marseille, convoqué ce mercredi par plusieurs maires de la nouvelle entité, avait une matinée pour se pencher sur le sujet. L'exercice a surtout eu pour effet d'ajouter une couche au concours d'origamis juridique qui oppose depuis plusieurs semaines les partisans du maire LR de Marseille à ceux rassemblés derrière la maire LR d'Aix, Maryse Joissains. Avec, pour enjeu, la taille du gâteau que chacun espère récupérer pour son territoire.
Rappel des matchs précédents : des maires de la communauté du Pays d'Aix, dirigée par Maryse Joissains, s'estiment lésés par la répartition des sièges au sein du futur conseil métropolitain. Ils saisissent le tribunal administratif qui, le 6 novembre, suspend les deux arrêtés préfectoraux fixant cette répartition. Le Conseil d'Etat est appelé à se prononcer mais dans l'intervalle, une première assemblée métropolitaine est convoquée le 9 novembre, durant laquelle Jean-Claude Gaudin est élu président. Re-colère des élus du Pays d'Aix, d'autant que le 18 décembre, le Conseil d'Etat apporte de l'eau à leur moulin : la Haute juridiction estime qu'il existe «un doute sérieux quant à la conformité de la composition du conseil de la métropole», et en appelle au Conseil constitutionnel, précisant qu'en attendant sa décision, le conseil métropolitain «ne peut donc pas siéger». Entre-temps, plusieurs maires – ceux de Cabriès, Martigues, Pertuis et Eguilles, ainsi que Stéphane Ravier, sénateur-maire FN des XIIIe et XIVe arrondissements de Marseille – ont aussi déposé un nouveau recours contre l'élection du président de la métropole. C'est sur celui-ci que se penchait ce mercredi matin le tribunal.
Etages d’arguments
Question centrale du débat : l’annulation des arrêtés préfectoraux du 6 novembre par le tribunal administratif s’appliquait-elle le 9 novembre, lors de l’élection de Jean-Claude Gaudin ? Oui pour les demandeurs, mais aussi – coup dur pour Jean-Claude Gaudin – pour Madame le rapporteur public, qui doit produire des conclusions qui sont ensuite suivies ou pas par le président du tribunal. Pour celle-ci, les décisions prises par le juge des référés le 6 novembre font autorité et sont exécutoires, le conseil de la métropole ne pouvait donc se réunir le 9 novembre – et donc élire son président.
Après les étages supplémentaires d’arguments posés par les avocats des maires frondeurs, le conseil du maire de Marseille a, lui, dégainé un savant jeu d’équilibriste pour tenter de balayer l’annulation des arrêtés le 6 novembre. Attention à ne pas rater une marche de son argumentaire : le 18 décembre, le Conseil d’Etat a dû d’abord annuler la décision prise en première instance par le tribunal administratif pour en prendre une autre, certes allant dans le sens d’une annulation des arrêtés préfectoraux mais pour des motifs différents de ceux invoqués le 6 novembre. Conséquence pour l’avocat, aujourd’hui, alors que le juge va devoir de nouveau délibérer, la décision du 6 novembre étant concrètement annulée, elle ne peut être applicable rétroactivement… Ces observations faites, il demande surtout au président du tribunal de surseoir à sa décision en attendant que le Conseil constitutionnel statut sur le fond du dossier, ce qui devrait intervenir, selon lui, fin janvier ou début février. A l’issue de l’audience, le tribunal a mis en délibéré sa décision, qui devrait être connue dans les huit jours.