«J'étais là l'an dernier, je voulais être là aujourd'hui.» La référence à la manifestation géante du 11 janvier 2015 est dans toutes les bouches ce dimanche matin. Pourtant, la cérémonie d'hommage aux victimes des attentats, qui vient clôturer la semaine commémorative, n'a rien à voir avec la marche d'il y a un an, qui avait rassemblé 1,5 million de personnes à Paris.
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«Il y a tellement peu de monde, s'étonne Sébastien, au troisième rang du maigre public, quelques milliers de personnes au plus. Ça doit être le côté officiel, cette fois-ci, ce n'est pas spontané.» «Peut-être que le battage médiatique a déprimé les gens, suppose sa compagne, Nathalie. Ou alors, c'est l'effet Johnny… Ce tout petit rassemblement en tout cas, ça aussi, c'est triste.» Un peu plus loin, Didier, qui a fait le déplacement depuis la Bretagne, comme l'an passé, enrage : «En fait, on ne devrait pas être là, personne ne voudrait être là, tout ça, cette tuerie absurde, n'aurait pas dû exister. Et on ne serait pas là aujourd'hui.»
Doubles contrôles et tireurs d’élite
Alain, sous son chapeau en feutre, est le seul à sourire : «Bien sûr que cela n'a rien à voir avec le 11 Janvier. Mais il y a quand même quelque chose à poursuivre, à transmettre. Depuis un an, les Français reprennent conscience, peu à peu, de ce qu'est la république. Les cérémonies servent à ça. Je suis confiant, ça se fait progressivement. Malgré tous les débats et les divisions nationales, je crois que les choses bougent.»
Sur la place de la République, devenue en 2015 un lieu de recueillement, le déploiement policier est impressionnant. L'ensemble de la place est entouré de barrières et les forces de l'ordre contrôlent à deux reprises toute personne qui souhaite y accéder. Sur les toits, on aperçoit des tireurs d'élite. Il n'est pas encore 11 heures quand la cérémonie débute. Anne Hidalgo, la maire de Paris, accueille François Hollande, le président de la République. Ensemble, ils dévoilent une plaque d'hommage aux victimes des attentats de janvier et novembre 2015, au pied d'un chêne du souvenir. «Ici même le peuple de France leur rend hommage.»
Minute de silence express
Sous un ciel grisâtre, le programme s'enchaîne au pas de charge. Johnny Halliday lance la partie avec la chanson Un dimanche de janvier, qu'il entonne face à la statue. Dans la foule, quelques «Johnny !» énamourés fusent. Après le rockeur exilé fiscal, c'est au tour des chœurs de l'armée française d'interpréter les Prénoms de Paris de Jacques Brel et le Temps des cerises. Entre-temps, deux étudiants en arts dramatiques lisent l'allocution prononcée par Victor Hugo lors de son retour à Paris en 1870. «Citoyens, j'avais dit : le jour où la république rentrera, je rentrerai. Me voici. […] Qui attaque Paris attaque en masse tout le genre humain. […] Étouffez toutes les haines, éloignez tous les ressentiments, soyez unis, vous serez invincibles.»
C'est la partie de la cérémonie qu'a préférée Bertrand Delanoë, l'ancien maire de Paris. Il en retient une phrase : «La fraternité sauvera la liberté.» Et se félicite de la tenue de ce moment de «commémoration officielle», qui «fait partie de l'histoire collective». La matinée se conclut par une minute de silence express, interrompue au bout d'une trentaine de secondes par la Marseillaise. François Hollande et Manuel Valls s'attardent quelque temps pour saluer les proches des victimes, au pied de la statue de la République. Il est 11h45, l'hommage dominical se termine.