Dimanche 13 décembre 2015, voilà un mois, 67 députés et 25 sénateurs étaient élus au second tour des élections régionales. 92 parlementaires placés ainsi en situation de cumul des mandats… sans qu’ils soient tous hors la loi : les règles, en la matière, sont parfois compliquées - et appelées à se durcir l’an prochain. 41 d’entre eux étaient en réalité obligés, après cette élection, de faire un choix. Pourtant, un mois après, quatorze ne l’ont toujours pas fait.
Ils ont choisi
Pas toujours facile de comprendre quelles sont les règles en matière de cumul des mandats. Néanmoins, s’il existe des exceptions, la règle de base est assez simple : tout parlementaire (député, sénateur, député européen) ne peut exercer en parallèle qu’un seul mandat local. Ce qui signifie que tous les députés et sénateurs élus aux régionales alors qu’ils exerçaient déjà un rôle local - presque toujours un rôle municipal, maire ou conseiller - se sont retrouvés en situation illégale de cumul des mandats. Il leur fallait donc choisir.
Le cas emblématique est celui de Xavier Bertrand, qui a démissionné avec fracas de son mandat de député. Il avait aussi annoncé son départ de la mairie de Saint-Quentin, mais la réalité est plus subtile. Elu à la tête de la région Nord-Pas-de-Calais-Picardie, l'ancien ministre de Nicolas Sarkozy ne pouvait être à la fois président de région et maire, même en démissionnant de l'Assemblée nationale, car il est interdit d'être le chef de deux exécutifs locaux. Il n'est donc plus maire… mais toujours conseiller municipal de Saint-Quentin.
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A l’instar de Xavier Bertrand, Gérald Darmanin (par ailleurs maire de Tourcoing), lui aussi élu en Nord-Pas-de-Calais-Picardie, a renoncé à son mandat de député. Idem pour le Réunionais Thierry Robert ou encore François Sauvadet, même s’il a été battu en Bourgogne-Franche-Comté. Natacha Bouchart, elle, a quitté le Sénat. D’autres ont préféré renoncer, à peine élu, à leur rôle régional, tel Eric Woerth, qui reste donc député et maire de Chantilly (Oise), ou le Guadeloupéen Eric Jalton.
Mais le plus fréquent est d’avoir démissionné de son rôle municipal. Laurent Wauquiez, élu à la tête de la région Auvergne-Rhône-Alpes, ne sera ainsi plus maire du Puy-en-Velay, ni Martial Saddier celui de Bonneville, entre autres exemples.
A noter, enfin, que plusieurs parlementaires élus aux régionales ont renoncé à un de leurs mandats alors que la loi ne les y obligeait pas. C’est par exemple le cas de Valérie Pécresse, qui a annoncé qu'elle allait renoncer à son poste à l’Assemblée nationale après avoir été élue à la tête de la région Ile-de-France, alors qu’elle aurait pu cumuler ces deux mandats.
Ils se taisent
Interrogés par leurs électeurs et les médias locaux, interpellés sur les réseaux sociaux, certains parlementaires dans l'obligation de choisir depuis un mois ne se sont toujours pas prononcés ouvertement. C'est par exemple le cas de Carole Delga, l'ancienne secrétaire d'Etat chargée du Commerce au sein du gouvernement Valls. Elue présidente de la région Languedoc-Roussillon-Midi-Pyrénées, elle est aussi députée… et adjointe au maire de Martres-Tolosane. Ils sont en tout 14 à devoir encore se prononcer. Théoriquement, ils avaient un mois, après le second tour des régionales, pour se mettre en conformité avec la loi.
Ils gagnent du temps
Théoriquement, car il existe de petites astuces. C’est la dernière option : faire le dos rond et n’agir qu’au dernier moment, quand cumuler n’est vraiment plus possible. Ainsi, Christian Estrosi avait annoncé, pendant la campagne des régionales, qu’il démissionnerait de la mairie de Nice, et peut-être même de l’Assemblée nationale. Mais il n’a rien confirmé depuis, et pour cause : un recours a été déposé contre son élection à la tête de la région Provence-Alpes-Côte-d’Azur. Or, si ce recours ne suspend pas le conseil régional élu le 13 décembre dernier, il interrompt le compte à rebours pour le cumul des mandats. Ce n’est qu’une fois le recours tranché que Christian Estrosi aura un mois pour choisir entre ses fonctions.
C'est tellement pratique qu'en Normandie, il existe de forts soupçons sur les recours déposés suite à l'élection d'Hervé Morin. Le maire d'Epaignes a annoncé qu'il renoncerait à son mandat de député, mais tant que le recours n'a pas été étudié, rien ne l'y oblige… Catherine Morin-Desailly et Estelle Grelier, toutes deux parlementaires en Normandie et elles aussi concernées, bénéficient de la même dispense. Il est des recours qui tombent à pic, quand même.