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Libération
Analyse

Pour Nicolas Sarkozy, un tournant décisif

publié le 24 janvier 2016 à 20h01

Nicolas Sarkozy est-il sincère ? Depuis que l’ancien président a publié son livre, tissé de repentirs divers, placé sous le signe de la contrition et de la confidence, on s’interroge gravement sur l’authenticité de cette confession distillée d’une plume à la fois agréable et familière. Question oiseuse en fait. A la lecture, on sent bien qu’il s’agit pour l’ex-président de gommer chez lui ce qui irrite la droite classique, son caractère imprévisible, ses formules à l’emporte-pièce, un goût maladroitement affiché pour le clinquant et le provocant, tout en protestant de sa volonté d’appliquer cette fois les réformes de rupture que la bourgeoisie française attend avec fièvre.

Mais une sincérité calculée reste une sincérité. Ils sont suffisamment rares les hommes politiques qui reconnaissent leurs erreurs pour ne pas saluer l’exercice de vérité auquel Nicolas Sarkozy se livre, avec un certain goût du risque. Puisse-t-il faire des émules dans la classe politique…

L’essentiel est ailleurs. A la fois retour sur son quinquennat chaotique et projection vers l’avenir, le livre dessine un projet qu’il faut méditer. S’il est appliqué, il fera prendre à la France un tournant décisif. Recul de l’Etat, forte baisse des impôts et des dépenses publiques, libéralisation du marché du travail, déréglementation profonde : le pays se lancera sur la voie anglo-saxonne tracée par Margaret Thatcher et Ronald Reagan. Ce libéralisme, qu’on retrouve dans les projets des autres candidats de droite, rapprochera la France, non de l’Allemagne ou des pays scandinaves, mais bien plus du Royaume-Uni, qui a relancé son économie en sacrifiant l’égalité sur l’autel de la croissance et de l’emploi.

A cela, Sarkozy, en bon élève de la révolution conservatrice, ajoute une série de mesures régaliennes qui le place, sur l’échiquier politique, à la droite de la droite : suppression de l’aide médicale d’Etat, rétablissement des frontières, suppression de toute prestation sociale aux sans-papiers, exigence d’assimilation plus que d’intégration, interdiction du voile à l’université, etc.

Sur tous ces points, l’aveu de l’ancien président est limpide : ma vraie erreur, dit-il, c’est de n’avoir pas été assez à droite. Là encore on saluera un effort de sincérité qui clarifie l’élection présidentielle à venir. Trois projets seront aux prises : nationaliste, anti-européen et social-étatiste à l’extrême droite ; libéral et national à droite ; social-libéral ou social-démocrate à gauche, si celle-ci parvient à s’unir pour concourir. Somme toute, c’est un vrai choix.