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Libération
Cible

Avec Taubira, FN et LR perdent leur punching-ball

La démission de Taubiradossier
Droite et extrême droite jubilent après la démission de la ministre de la Justice, leur tête de Turc favorite depuis 2012.
Jean-François Copé, à Lille, le 20 janvier. (Photo François Lo Presti. AFP)
publié le 27 janvier 2016 à 13h41

Vont-ils s'en remettre ? Euphorisés par la démission de Christiane Taubira, droite et extrême droite perdent avec elle une cible récurrente. Et presque une raison de vivre, tant la ministre de la Justice concentrait depuis 2012 des attaques d'une rare virulence. Vendredi matin, LR comme le FN se félicitaient du départ de leur bête noire. Pour le président des sénateurs LR, Bruno Retailleau, «Christiane Taubira incarnait le laxisme pénal depuis 2012». Pour celui des députés LR, Christian Jacob, «cela fait au moins deux ans qu'il n'y avait plus de garde des Sceaux». Quant à Marine Le Pen, elle a évoqué une «bonne nouvelle pour la France» et un «soulagement». «Celle qui hait la France jette l'éponge», commentait enfin un autre frontiste, Jean-Lin Lacapelle.

Cette hargne commune vis-à-vis de l'ex-ministre puise à plusieurs sources. Celle d'un supposé «laxisme», d'abord, qui aurait vu Christiane Taubira «vider les prisons», voire préférer les «voyous» aux «victimes» – l'accusation est de l'eurodéputé FN Nicolas Bay. L'adoption de la «loi Taubira» sur le mariage homosexuel avait définitivement installé la ministre comme bouc émissaire de la droite radicale. «L'héritage de Taubira : société divisée, enfants privés de filiation, essor d'un nouvel esclavage», a ainsi jugé la Manif pour tous sur Twitter, ce mercredi matin. Le mouvement organise par ailleurs un «pot de départ» place Vendôme, mercredi soir, pour fêter le départ de la ministre. Enfin, l'engagement de cette dernière contre l'extrême droite lui avait valu une hostilité particulière de la part du Front national. D'autant que le parti lepéniste fut prompt à voir la main de la ministre derrière chacun des nombreuses affaires le visant.

Racisme débridé

Autant de controverses que leur intensité et leur caractère personnel portaient bien au-delà de la joute politique «classique». Faire huer la ministre en était devenu une figure imposée des meetings FN. Réclamer son départ, un passage obligatoire pour les dirigeants LR. «Pour une fois que je ne demandais pas sa démission…» a d'ailleurs tweeté Jean-François Copé sur le ton de l'«humour», ce mercredi.

Aux griefs proprement politiques s'ajoutaient occasionnellement de moins avouables arrière-pensées. C'est-à-dire un racisme débridé vis-à-vis d'une ministre parfois comparée à un singe, de la part d'anonymes, de candidats tels que la frontiste Anne-Sophie Leclère ou encore de l'hebdomadaire d'extrême droite Minute. «Maligne comme un singe, Taubira retrouve la banane», avait titré celui-ci en novembre 2013 – ce qui avait valu une amende de 10 000 euros à son directeur de la publication pour «injure à caractère racial». Tout à sa joie, le journal fêtait mercredi la démission de sa tête de Turc en proposant des réductions de 50% sur ses abonnements.