Oncques ne vit jamais pareil pays que cestuy-là, ni peuple à tel génie. Pensez : sur 10 gens de labeur, il en est un sans ouvrage ; de vils sicaires ayant occis 130 malheureux en 9embre baillent menace de s’en prendre aux crèches de nos marmousets, l’estat d’eurgence foit perdre tout sens au commun, les isdées du FN courent le pays, et voilà que ce qui émeut le clocher et distrait la cervelle de ces lettrés que le monde ne nous jalouse guère, est une réforme de l’orthographe sis inventée en l’an de grâce 1990 et qui n’aurait prétendument force de loi qu’en l’an 2016, de ce que loin s’en faut. Pour un tilde circumflexe, un trait d’union, et de menus changements, ce sont les troubles de religion que l’on déclenche. Et l’on invoque, contre tout sens commun, l’histoire, les racines, Dieu, Mont-joie et saint Denis. Pour une pipistrelle devenue chauvesouris et une feuille de lotus grimée en nénufar, on crie à Valmy, à la Patrie en danger, à la ligne Maginot. Telle ardeur dépensée au service de pareille cause ne changera grand-chose à l’orthographe ; à ceste-là qu’aucun apprend sur les pupitres de nos belles et rieuses escholes, laïques et républicaines, dessinant les pleins et les déliés de nos plumes d’oie trempées dans les encriers de blanche porcelaine.
Pareille ardeur, doncque, est l’ultime preuve que nous, François, sommes Grande nation, toute prête à jailler pour l’unique plaisir de la querelle. Sublime que cette chose-là : car oncque n’y bailla jamais une once de sérieux. Théâtre que tout cela ! Chacun y va de sa pantomime, foin de surprise : le barbon grincheux et réac voue la ministre qui estouffe l’eschole aux gémonies, d’aucun demandera la disgrâce de Taubira et de Hollande. Et seule une nation sûre d’elle, de sa place dans l’univers, l’excellence de son eschole et de la brillance de son avenir se pourrait permettre d’oser se quereller une journée pour l’i de l’oignon.
Traduction à retrouver sur liberation.fr