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Interview

Philippe Doucet (PS) : «C’est la rigidité du code du travail qui entraîne la précarité»

Pour le député PS, la réforme permettra, en donnant plus de flexibilité aux patrons, de lutter contre le chômage de masse.

Philippe Doucet, député «réformateur», de l'aile droite du PS, le 19 juin 2013, à l'Assemblée nationale. (Photo Miguel Medina. AFP)
Publié le 19/02/2016 à 20h01

Philippe Doucet, député PS du Val-d'Oise, est en forme. Membre des «réformateurs», l'aile droite du PS, il défend le projet de loi El Khomri avec ferveur. Selon ses mots, la gauche qui critique le projet de loi n'est pas «dans la vraie vie», elle qui préfère «commenter et se plaindre».

Le projet de loi El Khomri fait beaucoup réagir à gauche : en l’état, voterez-vous en faveur de ce texte ?

Evidemment oui, je vote pour la loi. 80 % des Français pensent que le gouvernement n’a pas utilisé tous les moyens possibles pour lutter contre le chômage. Et tous ceux qui critiquent la loi sont dans le système. Mais personne ne donne la parole à ceux qui sont à l’extérieur du système : les chômeurs, ceux qui multiplient les missions en intérim et les CDD. C’est quoi, l’objectif du gouvernement ? Protéger ceux qui sont en CDI ? Très bien, et les autres ? Cette loi a pour objectif de déverrouiller le code du travail parce que la rigidité entraîne la précarité.

Aujourd’hui, être socialiste, ce serait donc être libéral ?

Il faut arrêter avec ces raccourcis. Etre socialiste, c'est lutter contre le chômage de masse. Celui qui pense que le socialiste est libéral, c'est son problème, il peut écrire une tribune dans Libé s'il veut se plaindre. Ces trucs intéressent la gauche militante, les journalistes. Mais sur le terrain, dans les quartiers populaires, les choses sont différentes. Vous pouvez venir dans ma circonscription, à Argenteuil, parler aux gens et faire de la philosophie sur le code du travail, ils s'en moquent : les gens veulent un emploi. Et beaucoup de patrons de PME ont peur d'embaucher parce qu'ils ne pourront pas se séparer d'un salarié si le carnet de commandes est vide. Avec la nouvelle loi, le patron aura moins d'incertitudes et plus de flexibilité. Si les boîtes d'intérim marchent bien en France, c'est parce que le patron de PME peut embaucher ou arrêter un contrat avec un simple coup de fil.

Après le débat sur la loi Macron, la loi sur la déchéance, vous ne craignez pas que la loi El Khomri fracture encore un peu plus la gauche et le PS ?

Vous savez, il y a deux gauches et deux visions différentes de la vie. Franchement, on ne va pas modifier une loi pour répondre aux états d'âme de Pascal Cherki [député de l'aile gauche du PS, ndlr] ou de la motion B du Parti socialiste. Ces gens préfèrent l'opposition, c'est toujours plus confortable. En fait, pour faire dans la métaphore, certains regardent les matchs de foot dans leur salon avec un petit verre et ils débriefent les actions. Et d'autres sont sur le terrain, ils jouent le match : c'est plus compliqué mais c'est la vraie vie. Moi aussi, lorsque je suis installé sur mon canapé, je pense que l'OM peut battre le PSG, mais sur le terrain, ce n'est pas le cas. Le PSG est beaucoup plus fort. Et j'aime bien les discours d'une partie de la gauche. Aujourd'hui, celui qui est en tête des sondages, c'est Manuel Valls, pas Jean-Luc Mélenchon. C'est peut-être difficile à admettre, mais c'est la réalité.