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Libération
Récit

Loi Travail : après les syndicats, Valls essaie de calmer les parlementaires

Le Premier ministre accepte un séminaire entre socialistes et gouvernement sur le projet de réforme du code du travail.
Manuel Valls arrive à l'Assemblée ce matin. (Photo Marc Chaumeil pour Libération)
publié le 1er mars 2016 à 16h11

Il entre sans un mot pour les journalistes, le regard noir. Une heure trente plus tard, Manuel Valls quitte l’Assemblée nationale un sourire coincé aux lèvres. Toujours pas de déclaration officielle mais le Premier ministre poursuit son job d’artificier sur la loi Travail. Après avoir fait baisser la pression avec les syndicats lundi en annonçant quinze jours de consultations, Valls accepte l’idée d’un séminaire de travail entre socialistes et gouvernement autour de ce texte qui enflamme la majorité depuis deux semaines.

Les proches du chef du gouvernement se chargent du service après-vente de la réunion de groupe socialiste, assurant que les opposants à la future loi sont désormais conciliants et mesurés dans leurs paroles. «Une vraie logique de construction et plus de destruction», vante Pascal Popelin quand Patrick Mennucci parle d'un «climat plutôt positif où tout le monde a dit ce qu'il avait à dire sans caricature». «Ni retrait ni enterrement : la très grande majorité des parlementaires socialistes veulent voir aboutir ce texte dans le cadre du débat et du dialogue», assure de son côté Razzy Hammadi. En visite dans une entreprise de Seine-Saint-Denis mardi matin, François Hollande a expliqué qu'il valait «mieux prendre du temps, pour mieux en gagner» sur cette loi, ultime tentative gouvernementale pour créer des emplois en France.

Retrait pur et simple

A la tribune, devant Manuel Valls, le président de l'Assemblée, Claude Bartolone, et le ministre des Relations avec le Parlement, Jean-Marie Le Guen, Christophe Sirugue a pourtant de nouveau prévenu qu'il refuserait d'être le rapporteur de ce texte à l'Assemblée s'il n'évoluait pas. Les positions du député de Saône-et-Loire «vont à la plupart d'entre nous», assure un parlementaire à la sortie de la réunion. Cela pourrait donc constituer une issue parlementaire pour le gouvernement même si les socialistes les plus virulents réclament le retrait pur et simple du texte qu'ils appellent désormais la «loi Valls» et plus El Khomri, du nom de la ministre du Travail absente pour un pépin de santé sur lequel la communication officielle s'est pas mal embrouillée mardi matin. «Il faut une nouvelle loi et un nouvel esprit», fait valoir l'ancienne ministre Aurélie Filippetti.

Les propositions de Sirugue et de la présidente de la commission des Affaires sociales, Catherine Lemorton, qui ont été reçus à Matignon mardi matin, sont cependant loin de toutes aller dans le sens de l'exécutif, comme la suppression de l'article 30 bis sur le licenciement économique. Dans le discours officiel, on parle de «corrections», de «modifications», d'«améliorations» voire d'«amodiations» mais jamais de suppression. «Le report va à tout le monde en espérant un compromis. Reste à savoir si celui-ci existe», explique donc un député opposé à la réforme.

Bras de fer

S'ils sont choqués par certaines dispositions du texte, les députés légitimistes ont surtout envie de calmer le jeu après des semaines particulièrement difficiles pour la gauche sur la déchéance de nationalité et la réforme du travail dans la foulée. Le bras de fer ultramédiatisé entre Martine Aubry et Manuel Valls la semaine dernière a laissé des traces. «La question de l'unité du Parti socialiste vaut plus cher que la question de la loi Travail», résume Patrick Mennucci. Selon un pilier de l'Assemblée, «le marais socialiste suivra s'il y a une petite musique positive qui vient des syndicats».

Comme en 2003, lors de la réforme des retraites, tout l'enjeu consiste donc pour François Hollande et Manuel Valls à «décrocher» les syndicats réformistes, la formule consacrée pour parler de la CFDT, concède un dirigeant du PS. Sauf qu'il y a treize ans, c'était la droite, Jean-Pierre Raffarin et François Fillon qui étaient à la barre. Pas un gouvernement socialiste.