Devant les lycées parisiens, les aménagements de la loi El Khomri ne pèsent pas lourd face au grand soleil. «Il y a clairement plus de mobilisation que la semaine dernière», remarque une jeune fille de première S qui hésite à rejoindre le mouvement devant le lycée Hélène-Boucher, dans le XXe arrondissement. Les blocages sont en tout cas plus sévères.
Dès 5 heures du matin, des élèves ont commencé à ramasser les poubelles du quartier pour les entasser devant les portes de l'établissement. Un rituel des manifestations étudiantes qui provoque inévitablement quelques tensions. Devant le lycée Dorian, dans le XIe : «Non, non, tu ne peux pas forcer les gens à ne pas rentrer !» tente d'expliquer un grand maigre à capuche à un camarade excité.
— Ils sont censés être avec nous à la manif.
— Mais tu ne peux pas les contraindre physiquement !
— Moi je suis un soldat, je bloque, je bloque, c’est la solidarité.
— On va arrêter le barrage filtrant, sinon ça va terminer en baston…»
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Vers 11 heures, la plupart des grévistes convergent vers la place de la Nation, d'où part le pré-défilé lycéen. Là aussi, il y a davantage de monde que le 9 mars. «La garantie jeunes, ça nous va, une loi avec uniquement la garantie jeunes, on dit oui, explique Christine, en seconde générale, qui participe à son premier mouvement social. Mais il y a d'autres problèmes. Surtout les licenciements. La correction de la loi a été superficielle.»
Venus de tout l'Est parisien, et aussi de banlieue, les lycéens ont commencé à marcher vers la place de la République. Une élève du lycée Sophie-Germain (situé dans le centre de Paris) regarde les manifestants s'éloigner en chantant : «Moi j'ai du mal à me faire un avis, avoue-t-elle à voix basse. En vrai, la loi fait des dizaines de pages, c'est difficile de comprendre quoi que ce soit, il faut bien le dire. Et puis je me demande quel impact la manifestation va avoir…» Il est finalement peu question de barèmes d'indemnités ou de forfait-jours dans les discussions, ce matin, place de la Nation. Les élèves ont simplement «pris goût» à la rue, dit un lycéen. Et le gouvernement aura du mal à désamorcer le mouvement.