«Le CDI est pour moi un Graal, et maintenant, on le précarise avec la loi El Khomri. C’est pour cela que je manifeste aujourd’hui, c’est la goutte d’eau. J’ai un bac + 5, je suis payé au Smic, mon contrat se termine le 4 mai. Après, je ne sais pas… Soit je suis renouvelé, soit j’irai à Pôle Emploi. C’est le plus long contrat que j’ai jamais eu, six mois. D’habitude, cela ne dure que quelques semaines ou quelques jours. Du coup, je n’ai eu accès qu’une seule fois à des indemnités chômage, sinon c’est le RSA. C’est dur de vivre avec 500 euros. L’ascenseur social n’est pas en panne, il n’existe plus. Oui, notre génération est sacrifiée, nous aurons un niveau de vie inférieur à celui de nos parents et grands-parents. Nous sommes déjà flexibles, mais tout le reste est rigide. Comment fait-on quand on est précaire pour louer un appartement, signer un bail, faire un prêt à la banque, fonder une famille ? On ne peut plus se projeter. En mai, à la fin de mon CDD, je ne sais pas ce que je vais faire. J’irai tenter ma chance à Pôle Emploi si je ne suis pas renouvelé. Et je ressens une ambiance de culpabilisation permanente : si on ne trouve pas de travail, c’est qu’on ne cherche pas assez. Hollande a été élu contre le programme libéral de Sarkozy plus que pour lui-même, et finalement, il mène la politique que Sarko lui-même n’aurait pas osé faire ! Avant la loi El Khomri, il y a eu d’autres horreurs : la loi Macron, le pacte de responsabilité, les cadeaux aux entreprises sans contreparties, l’état d’urgence, la déchéance de nationalité… La seule chose de gauche qui a été faite et réussie, c’est le mariage pour tous. J’attendais de la gauche qu’elle aille dans le sens du progrès social.»
Témoignage
Yvonnick Pongerard, 32 ans, zootechnicien en CDD au CNRS : «Nous sommes déjà flexibles, mais tout le reste est rigide»
par Noémie Rousseau
publié le 17 mars 2016 à 20h01
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