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Libération
Réforme constitutionnelle

Alors ? Congrès ou pas Congrès ?

Si François Hollande a dit jeudi «clore le débat constitutionnel», il reste tout de même sur la table des parlementaires la réforme du Conseil supérieur de la magistrature.

François Hollande lors du Congrès réuni à Versailles le 16 novembre 2015, trois jours après les attentats. (Photo Michel Euler. AFP)
Publié le 01/04/2016 à 16h58

C'est vrai qu'il y a de quoi s'y perdre. Mercredi, dans sa courte allocution au sortir du conseil des ministres, François Hollande a bien annoncé qu'il renonçait à poursuivre la révision constitutionnelle lancée au lendemain des attentats du 13 novembre 2015. «J'ai décidé […] de clore le débat constitutionnel», a affirmé le chef de l'Etat, prenant acte du refus de la droite sénatoriale d'accepter le compromis trouvé à l'Assemblée sur l'inscription dans la Constitution de l'état d'urgence et sur la possibilité de déchoir de leur nationalité tout Français condamné pour terrorisme. Impossible, dans ces conditions, d'imaginer convoquer députés et sénateurs pour un Congrès à Versailles puisque les deux chambres ne sont pas capables de s'entendre sur un texte conforme. Et pourtant…

L’indépendance de «tous les magistrats»

Sur la table parlementaire, il reste un texte constitutionnel : la réforme du Conseil supérieur de la magistrature (CSM). Jeudi, le ministre de la Justice Jean-Jacques Urvoas a ainsi annoncé que le gouvernement n'abandonnait pas cette promesse présidentielle de «garantir l'indépendance de la justice et de tous les magistrats», y compris celle des procureurs aujourd'hui nommés par le gouvernement sur recommandation du CSM. Le projet de l'exécutif est de couper totalement ce lien entre parquet et gouvernement. «Je pense que je vais […] réussir», a affirmé Urvoas jeudi.

Pour convoquer un Congrès sur ce sujet, il faut donc – comme pour le projet de loi constitutionnel avorté – un vote conforme entre des deux chambres. La semaine prochaine, l’Assemblée nationale devrait ainsi adopter la version du projet très allégée par le Sénat en juillet 2013. L’occasion pour l’exécutif de mettre les députés de droite devant leurs responsabilités : puisque c’est le texte voté par leurs propres camarades sénateurs, ils attendent des députés LR qu’ils votent ce texte et prouvent qu’il est possible de réunir à Versailles, pour un Congrès, une majorité des trois cinquièmes de l’ensemble des parlementaires.

«A la droite de montrer aux Français si elle sait être cohérente»

«On a toujours dit que l'état d'urgence et la déchéance d'un côté, la réforme du CSM de l'autre étaient deux choses séparées, explique-t-on à l'Elysée. On poursuit donc le processus pour voir qui vote quoi à l'Assemblée : on va voir ce que la droite a dans le ventre.» Dans l'entourage du chef de l'Etat, on rappelle ainsi que la droite a refusé la reconnaissance des langues régionales et la suppression de la nomination automatique du président sortant au Conseil constitutionnel. «Le problème n'est pas d'être en opposition mais de décider sciemment de faire de l'obstruction, critique un proche de François Hollande. C'est la droite au Sénat qui a fait voter la réforme du CSM telle qu'elle existe aujourd'hui. C'est à la droite de montrer aux Français si elle sait être cohérente.»

«Nous sommes prêts à voter le texte qui a été voté par la droite au Sénat, rendant possible la révision constitutionnelle, a souligné le patron des députés socialistes, Bruno Le Roux, dès jeudi. Regardez attentivement ce qui se passera : la droite cherchera à faire un pas de côté pour que ce texte ne soit pas adopté». L'occasion, aussi, de lancer à la figure du camp d'en face, dont l'un des ténors, Nicolas Sarkozy, est cerné par les affaires, qu'il n'est pas au «rendez-vous de l'union nationale» quand il s'agit de «garantir l'indépendance de tous les magistrats». Ça ressemble à un argument de campagne avant la présidentielle.