Du haut des fenêtres des palais ministériels, un mouvement étudiant et lycéen qui, un jour de météo clémente, s’essouffle est toujours une bonne nouvelle. C’est souvent le signe avant-coureur de l’ouverture d’une porte de sortie. Pour autant, le gouvernement de Manuel Valls aurait tort de se féliciter trop vite. Il n’a rien gagné. Juste un peu de temps. D’abord, parce que ce cortège du jour n’est qu’une seule face d’un mouvement protéiforme, inédit en France, qui déborde le cadre classique de la mobilisation syndicale. Né(s) du rejet de la loi travail, ce(s) mouvement(s) qui entremêle(nt) mal-être étudiant, exaspération sociale, déception d’un quinquennat et besoin d’un nouvel horizon à gauche peut encore rebondir. Ou muter sous d’autres formes. Depuis vendredi, dans plus d’une vingtaine de villes, des milliers de Français investissent chaque soir les centres-villes pour débattre, échanger… chercher une autre façon de penser et de faire de la politique. Nul ne peut savoir ce que cet embryon va devenir. Il y a dans l’inconscient du peuple de gauche (mais aussi dans une partie de l’électorat de droite) une énorme envie que quelque chose se passe, se déclenche. Un mouvement. Un espoir. Le besoin de bouger les meubles et d’ouvrir les fenêtres. Avec qui ? Comment ? Pourquoi ? Personne ne sait aujourd’hui répondre à ces questions. Mais le fait qu’une majorité de Français soutiennent encore ces mobilisations contre la loi travail est la traduction de cette envie d’avoir envie. De cette peur que tout retombe dans une torpeur mortifère. Le succès de la pétition contre la loi El Khomri et celui de l’appel à l’organisation d’une primaire des gauches sont les signes qu’il y a, certes, de la déception, de la colère, mais pas de résignation. C’est une excellente nouvelle pour le pays. Mais pas forcément pour le gouvernement.
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