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Libération
Coup de gueule

Primaire : le cri d'alerte de Cohn-Bendit

L'ex-député européen, signataire de l'appel «Notre Primaire», s'inquiète de la division à gauche qui pourrait rendre impossible la désignation d'un candidat commun en 2017.
Daniel Cohn-Bendit, lors du lancement du débat «Notre Primaire» à Paris, le 3 février. (Photo Albert Facelly pour Libération)
publié le 5 avril 2016 à 11h45

Parfois, un bon coup de gueule peut faire avancer les choses. Inquiet de l'enlisement actuel de l'initiative d'une «primaire des gauches et de l'écologie», lancé par un appel publié mi-janvier dans Libération, Daniel Cohn-Bendit doute. Dans une interview au Monde, l'ancien patron des écolos au Parlement européen alerte sur les difficultés que connaît l'opération destinée, au départ, à rassembler dès le premier tour de la présidentielle les forces de gauche pour éviter de laisser le second tour à la droite et l'extrême droite. «J'observe que le fossé entre toutes les composantes de la gauche et des écologistes ne cesse de grandir, explique-t-il. Pour faire une primaire, il faut un minimum de confiance et de respect. Le refus jusqu'à la haine contre le gouvernement, tout comme la condescendance de ce dernier face aux autres forces politiques à gauche, rend les conditions pour organiser une primaire de plus en plus délicates.»

«Personnellement très pessimiste», Cohn-Bendit rappelle qu'au départ, «l'argument selon lequel la gauche serait absente du second tour s'il n'y avait pas qu'un seul candidat de gauche au premier tour de la présidentielle a fonctionné comme un argument massue». Ecologistes, Parti communiste puis même la direction du Parti socialiste avaient répondu «oui» aux signataires issus pour l'essentiel du monde universitaire, culturel et associatif. «Mais aujourd'hui, on arrive à un point crucial et compliqué», dit-il. Ce week-end, EE-LV et le PS doivent affiner leurs positions – notamment en termes de règles et de calendrier – sur cette primaire. Or beaucoup craignent que chacun joue la montre et ne s'engage pas pleinement dans ce processus qui impliquerait de soutenir le candidat désigné… y compris s'il s'agit de François Hollande.

«Infaisable»

«Le climat politico-culturel rend infaisable cette bonne idée, regrette Cohn-Bendit. C'était une proposition juste, qui aurait pu permettre à la gauche et aux écologistes de sortir par le haut du marasme dans lequel nous nous trouvons. Mais étant donné ce qui s'est passé autour de la déchéance de nationalité et de l'accueil des réfugiés, trouver une position commune entre la gauche sociale-libérale et une partie de la gauche de la gauche, en passant par les écologistes, me paraît pratiquement impossible.»

«Dany est un joueur solitaire, une fois que ça ne l'amuse plus, il passe à autre chose, critique un de ses camarades écologistes. Tout le monde savait que cette histoire de primaire le gaverait très vite.» Si la primaire échoue, Cohn-Bendit misera alors sur Nicolas Hulot, qui a exclu – comme Jean-Luc Mélenchon – de participer à une primaire. «Lui seul aura la capacité de rassembler des écologistes, en partie des socialistes et même des centristes, selon l'ex-député européen. Il peut représenter une candidature non partidaire.» Pour autant, Cohn-Bendit ne lâche pas encore l'affaire de la primaire. Le 16 avril, il sera présent au Forum «Notre Primaire», organisé par Libération au Théâtre de la Porte Saint-Martin.