Au sortir du métro République à Paris, l’imposant campement est immanquable. Ici, on se serre les coudes pour assurer la logistique de ce lieu inédit. Quotidiennement démonté, reconstruit et customisé, ce petit village autogéré est le fruit d’une organisation bien ficelée où chacun est libre d’apporter sa contribution.
Débrouille
Des bâches, des palettes, des cartons et quelques tentes. Le village des «insurgés de République», c'est un hymne à la débrouille. On y trouve une infirmerie de fortune, une cantine et même un dortoir pour les plus téméraires. Niveau construction, chacun s'entraide comme il peut. «Beaucoup de gens font des tours en voiture ou à pied pour récupérer du matos», explique Anne-Lise, éducatrice de prévention spécialisée et bénévole à République. «Le patron d'une petite entreprise de cordistes nous a même proposé de nous filer des palettes, des cordes, des bâches», poursuit-elle. Après une semaine d'existence, le campement gagne en organisation chaque jour. Entre les débats et les assemblées générales, des animations viennent rythmer les soirées. Concerts de rap, construction de banderoles et projection de films… Pas le temps de s'ennuyer.
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Commissions
Différentes commissions structurent le mouvement. Les réunions sont publiques et chacun est libre d'y participer et d'apporter ses suggestions. Alors que la commission «action» organise des initiatives concrètes, la section logistique veille au bon fonctionnement du campement. L'infirmerie a besoin d'électricité ? Pas de problème : «On a installé un vélo relié à un transformateur», explique Anne-Lise. On pédale à tour de rôle pour faire tourner la dynamo. Question nourriture, la commission «restauration» est aux petits oignons. «Des volontaires qui bossent en cuisine s'autogèrent pour récupérer de la nourriture sur les marchés ou ailleurs», explique une militante de la première heure. Soupes ou couscous à prix libre sont ainsi disponibles pour les militants comme pour les curieux. Les fonds servent à acheter des aliments. Récemment, des marchands de sandwichs extérieurs au mouvement se sont installés sur place. En cas de digestion difficile, pas de panique : des toilettes sèches sont en cours de réalisation.
Démocratie
A l'instar des Indignés espagnols, la commission «citoyenne» veille au fonctionnement démocratique du mouvement. Les décisions sont votées à mains levées et aucun chef n'impose sa loi. En AG comme dans les commissions, c'est la foule qui a le dernier mot. Parmi les décisions votées : accueillir des sans-papiers et les aider dans leurs démarches administratives. Ces derniers ont d'ailleurs eu la visite, mercredimatin, des forces de l'ordre qui tolèrent leur présence à condition de démonter les tentes. La question d'un campement pérenne est un point de tension entre les occupants et les autorités. L'entourage d'Anne Hidalgo, la maire de Paris, explique que la place de la République ne peut pas être «monopolisée».
Médias
Pour assurer la communication, la commission «médias» récupère les mails des volontaires comme des curieux. La plupart du temps, les échanges se font via l'application de communication cryptée Telegram. Mais si des curieux souhaitent entrer en contact, les militants insistent : «Le meilleur moyen reste de venir sur le terrain.»