Les affaires ? Nicolas Sarkozy affecte de les ignorer, expliquant à ses amis qu'elles déboucheront «évidemment» sur de nouveaux non-lieux. Il en ira de l'affaire Bismuth comme il en est allé de l'affaire Bettencourt. Il n'empêche. L'agenda politique de l'ex-chef de l'Etat est bien indexé sur son agenda judiciaire. Au début de l'été 2014, c'est d'abord pour riposter à la menace des juges qu'il a précipité son retour en redevenant président de parti, métier ingrat qu'il s'était juré de ne plus jamais exercer.
Flagrant délit. Jamais il ne se serait lancé dans cette aventure à haut risque sans la double explosion qui menaçait de contrarier sa troisième candidature à la présidence de la République : le scandale Bygmalion, fin mai 2014, suivi, un mois plus tard, par le flagrant délit du présumé corrupteur Paul Bismuth. C'est au lendemain de sa mise en examen dans cette affaire, après seize heures de garde à vue, que Sarkozy a mis fin à sa pseudo-retraite politique. Le 2 juillet 2014, il s'invitait à la télévision pour dénoncer une «instrumentalisation de la justice» par des juges animés de la «volonté de [l']humilier», lui qui n'a «jamais commis aucun acte contraire à l'idéal républicain».
Neuf mois plus tard, Sarkozy jongle avec deux casquettes : officiellement chef de parti, officieusement candidat à la primaire. Dans les faits, il est de plus en plus candidat. Ses sympathisants ont reçu au début du mois des appels aux dons, et le site Sarkozy.fr les invite à rejoindre «l'équipe de La France pour la vie».
Les statuts du parti stipulent que le président de Les Républicains démissionne dès lors qu’il se déclare candidat à la primaire. En repoussant sa déclaration au 9 septembre, date limite de dépôt des candidatures, il se soustrait à cette obligation. Ce qui lui permet de rester chef de LR, et donc de faire campagne aux frais du parti tandis que ses concurrents doivent puiser dans les caisses de leurs micropartis. Valérie Debord, porte-parole du président-candidat Sarkozy, accusait lundi matin François Hollande de faire campagne pour 2017 avec les moyens de la présidence de la République. L’hôpital qui se moque de la charité.
Humiliation. Pour Nicolas Sarkozy, les bénéfices de sa prétendue non-candidature ne sont pas seulement financiers. Celle-ci lui permet aussi, si les choses tournent mal, de renoncer in extremis à se présenter, sans trop perdre la face. Un tel revirement serait peu compatible avec la légendaire pugnacité sarkozyste. L'ancien chef de l'Etat est sans doute capable de se lancer dans une compétition sans être certain de la gagner. Mais s'il peut prendre ce risque, on le voit mal prenant celui de subir l'humiliation que lui prédisent aujourd'hui les sondages. Bien plus que la menace judiciaire, c'est la perspective d'une punition électorale qui pourrait faire douter Sarkozy.