Et si l'«étape d'après», autrement dit le prochain épisode de la contestation qui gronde depuis début mars en France, commençait à Marseille, au congrès de la CGT ? Réunis depuis lundi et jusqu'à vendredi au Palais des congrès, nombre de délégués cégétistes n'en réclament pas moins. Ils sont plusieurs à se relayer au micro pour demander au syndicat «une impulsion», en se montrant notamment plus offensif face à la loi El Khomri. Ils posent la question de la grève reconductible.
Mais, à ce jour, rien de tout ça. «Pour le moment, l'organisation n'encourage pas le truc, mais cela peut s'imposer à elle, résume Karl Ghazi, secrétaire de la CGT commerce de Paris. Les prises de parole poussent vers cela. Certains plaident pour la grève reconductible, d'autres veulent que l'on interroge les salariés dans les boîtes sur le sujet. Et puis, il y a les raisonnables, qui disent que c'est irréaliste. Mais le sujet est très présent.» «Il faut que les salariés puissent décider en assemblées générales des formes d'actions qui leur sont propres, explique, de son côté, à Libération, Philippe Martinez, le secrétaire général de la CGT. Y compris ne pas s'interdire des grèves. C'est les salariés qui décident, la CGT, elle doit impulser.» Avant de préciser que, pour répondre au message des congressistes, «une motion, qui est pratiquement rédigée, va être présentée au congrès, pour continuer à impulser».
«L’étape d’après»
Mais, pour nourrir ces débats, certains militants, notamment du SNJ-CGT, le syndicat des journalistes, ont une autre idée : inviter François Ruffin, le journaliste et réalisateur du film Merci patron ! à la tribune du Congrès, jeudi. «La demande a été faite auprès du bureau du congrès. Ce film est un succès, il faut s'appuyer dessus», explique un syndicaliste. Mais, pour l'heure, pas de réponse, explique-t-il, de la part du bureau du congrès. «S'il veut venir, il est le bienvenu», pointe Philippe Martinez. Pourrait-il alors s'exprimer au micro ? Rien n'est moins sûr. «Il n'est pas délégué au congrès et les prises de parole sont réservées aux délégués», précise le patron de la CGT.
Pour un syndicaliste présent au Congrès, la CGT traîne un peu des pieds, «car elle a parfois tendance à croire qu'elle est seule au monde». Pourtant, les débats qui animent la centrale syndicale à Marseille ne sont pas si éloignés de ceux à l'ordre du jour de la soirée-débat organisée par Fakir et la commission convergence des luttes de Nuit Debout, ce mercredi, à 19 heures, à la Bourse du travail de Paris. Son but : aborder l'avenir du mouvement citoyen né le 31 mars et donc plancher donc sur l'«étape d'après».
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Partant du constat que les rassemblements qui s'organisent sur les places de République et d'ailleurs «sont une belle réussite», les organisateurs de Nuit debout tirent toutefois la sonnette d'alarme : «Attention à ne pas croire que la "grève générale", voire la "révolution" vont advenir, parce qu'on les évoque de manière incantatoire dans les AG.» Les questions qu'ils posent sont nombreuses : une «nouvelle impulsion» est possible, mais pour aller «vers où, justement ?» «pour faire quoi ?» quelle «orientation pour les semaines à venir ?» Et surtout celle-ci : «On parle de "convergence des luttes", mais les Nuits debout ont-elles, pour l'instant, déclenché la moindre grève sectorielle – sans parler d'une "générale" ?» De quoi faire réagir à Marseille.