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Libération
Billet

Hollande et les limites du «moindre mal»

publié le 26 avril 2016 à 19h51

Loin d’une adhésion passionnelle à sa personne ou même à ses idées, François Hollande est d’abord apparu en 2012 comme un candidat raisonnable à ceux qui voulaient éviter, et épargner à la France, un nouveau quinquennat Sarkozy. Cela n’a rien d’infamant mais ne dessine pas une relation particulière avec les Français. Elu contre Sarkozy davantage que pour lui, en somme, dans un contexte où, dynamique d’alternance oblige, la qualification du candidat PS pour le second tour ne posait guère question.

Cinq ans plus tard, la donne a radicalement changé, avec la dynamique électorale du FN conjuguée à un affaissement des partis dits de gouvernement, PS en tête ou plutôt en queue. Désormais, l’enjeu premier - Lionel Jospin l’avait zappé en 2002 - consiste déjà à figurer au second tour, face au FN en l’état actuel de l’opinion. Et si la possibilité même pour Hollande, pourtant président sortant, d’être candidat à sa réélection se pose toujours à un an du scrutin, de façon inédite, c’est aussi et même beaucoup parce qu’il est jugé incapable de passer le premier tour. Sans, d’ailleurs, que des personnalités de son camp n’en soient, elles, assurées : pas plus Valls ou Macron, sur le credo de la modernité droitière, que Aubry, Montebourg ou même Mélenchon, sur celui du PS canal historique. Ce dernier, que certains sondages créditent actuellement d’intentions de votes lui permettant de faire quasiment jeu égal avec un Président démonétisé qu’il s’imagine bien devancer, n’atteint toutefois pas un niveau suffisant pour dépasser la droite ou l’extrême droite. Cette réalité est la chance de l’actuel locataire de l’Elysée, figure moins clivante que nombre de ses concurrents et donc potentiellement plus rassembleuse. Et après avoir passé une large part du quinquennat à ferrailler dans son camp avec une fronde plus ou moins élargie, Hollande connaîtra à la fin de l’année le vainqueur de la primaire de la droite, sur lequel lui qui n’est jamais aussi bon que confronté au camp d’en face pourra se focaliser. Dans ce qui sera une finale avant l’heure si on part du principe, plus vraiment acquis, qu’un candidat PS ou LR l’emportera mécaniquement au second tour face au FN.

Cette fois, si Hollande est de nouveau candidat et s’il ne veut pas achever piteusement son quinquennat au soir du premier tour, il devra donner aux électeurs l’envie d’avoir envie de voter pour lui dès le premier tour, au milieu d’une dizaine d’autres candidats et non face à un repoussoir évident au second. Mais pour ce faire, le refrain du «moindre mal» entonné depuis quelques semaines par les chœurs hollandais ne suffira pas. Les socialistes, après cinq années au pouvoir, ne pourront se contenter de marteler qu’une gauche, si social-libérale soit-elle, vaut toujours mieux que la casse sociale promise par une droite Juppé-Fillon- Sarkozy-Le Maire ouvertement ultralibérale. Et quant au bilan «social» de François Hollande, en particulier sur le front du chômage, il est une condition nécessaire de sa candidature mais en aucun cas suffisante en soit pour remobiliser la gauche en sa faveur.

Depuis mai 2012, il a beaucoup été reproché au chef de l’Etat de ne pas avoir de vision ou en tout cas d’être incapable d’en narrer l’horizon. Pour la campagne de 2017, s’il en est, il s’agira d’être cette fois limpide sur ses intentions et ses ambitions, seul moyen de susciter de l’adhésion.

Sans cela, la débandade sera assurée. Autant que François Hollande opte dans ce cas pour la sortie par le haut la plus confortable : renoncer de son propre chef.