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La famille

Le 1er mai de Le Pen fille parasité par Le Pen père

A la place du traditionnel rassemblement au pied de la statue de Jeanne d'Arc, le FN organisait cette année un «banquet patriote» autour de la présidente du parti d'extrême droite. Mais c'était sans compter l'ex-leader frontiste, qui a organisé sa propre manifestation.

Marine Le Pen et des leaders du parti d'extrême droite devant la statue de Jeanne d'Arc, à Paris, ce dimanche. (Photo Dominique Faget. AFP)
Publié le 01/05/2016 à 18h28

Pour la deuxième année consécutive, Jean-Marie Le Pen aura donc réussi à perturber le 1er mai du Front national. Huit mois après son exclusion, et alors que le parti a transformé son traditionnel défilé en «banquet patriote», l'eurodéputé organisait dimanche matin son propre rassemblement, place des Pyramides à Paris. Seules 400 personnes ont répondu à l'appel, dont plusieurs représentants de l'extrême droite la plus radicale. Un échec militant éclipsé par cette surprise : malgré l'interdit posé par la direction du FN, pas moins de trois eurodéputés se sont affichés en compagnie de Jean-Marie Le Pen : Bruno Gollnisch, Mireille d'Ornano, Marie-Christine Arnautu, trois fidèles du «vieux», tous élus sur sa liste lors des élections européennes de 2014.

Jean-Marie Le Pen a renouvelé devant eux ses virulentes attaques contre le FN mariniste. Comparant son exclusion à la «décapitation de Louis XVI par les révolutionnaires», l'orateur a aussi fustigé la stratégie de «dédiabolisation» menée par sa fille, «un calcul de naïf, de sot ou de traître». L'ex-président frontiste a enfin jugé que sa fille serait «battue au second tour de la présidentielle et peut-être même au premier», sous les applaudissements du public.

Leur petite visite pourrait coûter cher aux trois élus frontistes – d'autant plus que Marie-Christine Arnautu figure parmi les cinq vice-présidents du parti. «Si des cadres se rendent [à ce rassemblement ndlr], ce sera un acte d'hostilité, donc ils passeront en commission de discipline», avait prévenu dès vendredi un autre vice-président du FN, Florian Philippot. Dimanche, plusieurs responsables jugeaient sévèrement leurs camarades. «A un moment, il faut choisir son camp, déclarait ainsi Steeve Briois, l'un des vice-présidents du parti. Je souhaite qu'ils quittent la direction du parti, que Marie-Christine Arnautu perde sa vice-présidence. Ils n'ont plus rien à faire au FN.» Le sujet devrait être débattu lundi lors d'un bureau politique du Front national.

Hangar sans charme du nord-est parisien

En attendant, le parti a inauguré dimanche la nouvelle formule de son hommage à Jeanne d'Arc. Officiellement destinée à garantir la sécurité des participants, celle-ci devait surtout limiter les risques d'image pour le parti, après le désastreux rassemblement du 1er mai 2015. En milieu de journée, c'est dans un hangar sans charme du nord-est parisien qu'étaient rassemblés quelque 2 000 cadres et militants frontistes, pour un grand repas en commun doublé d'une série de discours. Sans surprises, celui de Marine Le Pen a vu la future candidate enterrer le «clivage disparu» entre droite et gauche, brocarder Alain Juppé («déjà ministre quand j'avais 18 ans») ou prôner une sortie de l'euro, proposition centrale, mais peu populaire, du programme frontiste.

«En tout domaine, la France a besoin d'apaisement, a lancé Marine Le Pen, en allusion au nouveau slogan de son parti. Cette paix, nous ne l'aurons qu'en prenant des décisions qui rompent avec des décennies de reculade.» En particulier, «comment la France serait-elle apaisée quand elle reçoit chaque année autant d'étrangers ? Nous n'avons rien à leur offrir», a tranché Marine Le Pen, fustigeant «l'Europe de Schengen, Europe des voleurs et de receleurs».

Le rassemblement a aussi vu une proche de Florian Philippot, l'élue de Bourgogne-Franche-Comté Sophie Montel, critiquer à mots couverts Marion Maréchal-Le Pen, en prônant dans son discours la «sanctuarisation de l'accès à la contraception» et en célébrant «les valeurs de la République». Deux piques à l'encontre de la députée du Vaucluse : lors de sa campagne en Paca, celle-ci avait promis de supprimer les subventions au Planning familial. Plus récemment, elle s'était aussi interrogée sur «les valeurs de la République qu'on nous sert en permanence et dont on ne sait pas ce qu'elles recouvrent». Marine Le Pen l'a répété : elle veut fuir le «buzz parisien» et les «polémiques futiles». «Je ne suis pas aidée», aurait pu ajouter la présidente du Front national.