La cohérence, ce serait Juppé. Voilà, en substance, ce que les électeurs sont invités à retenir du programme économique du favori de la primaire de la droite et du centre. Devant un parterre de sympathisants et de chefs d'entreprises, le maire de Bordeaux dévoilait mardi soir ses propositions, rassemblées dans un nouveau livre (Cinq Ans pour l'emploi, JC Lattès) à paraître ce mercredi. Alain Juppé laisse Bruno Le Maire à son «renouveau», François Fillon à sa «rupture radicale» et Nicolas Sarkozy à sa légitimité de chef de «la famille», garant de l'unité.
Les lieutenants juppéistes veulent clouer le bec à tous ceux qui font passer leur patron pour un demi-réformateur, un candidat du consensus soucieux de ne pas abîmer sa confortable popularité. «Juppé est un sursis. Moi, je suis un sursaut», a lâché Le Maire fin avril. Sans nommer son rival, Fillon le vise implicitement quand il dénonce «les bonimenteurs qui disent qu'on peut leur redonner de l'espérance avec des tisanes».
Avec son précédent livre, Pour un Etat fort, Juppé avait voulu faire taire les sarkozystes qui le caricaturent en «homme de gauche». L'inventeur de «l'identité heureuse» avait dégainé une série de propositions puisées au catalogue de la droite dure (rétablissement des peines plancher, révision de l'aide médicale d'Etat, durcissement des conditions d'acquisition de la nationalité française). Il veut démontrer aujourd'hui qu'il n'est pas le moins réformateur. Posant que ce qui est bon pour les entreprises est bon pour les Français, il attaque simultanément sur trois fronts : marché du travail, coût du travail et fiscalité des entreprises. Il supprime l'impôt de solidarité sur la fortune, comme les régimes spéciaux, fixe la retraite à 65 ans et instaure la dégressivité des allocations-chômage. Il se fait fort de convaincre que ce sont là les conditions d'un retour au plein-emploi. Pour faire la différence, il mise sur la crédibilité, qualité qui ne serait pas la mieux partagée.
C’est de bonne guerre : les candidats vont chercher à marquer leur singularité. Mais leurs programmes économiques ne sont pas si différents. Fillon a placé la barre très haut dès 2014 en prônant plus de 100 milliards d’euros de réduction de la dépense publique. Tous les candidats se sont, peu ou prou , ralliés à cet objectif, à la grande satisfaction de la gauche qui dénonce déjà les liquidateurs du modèle social français.
La semaine dernière, Juppé s'est défendu de remettre en cause «l'héritage du Conseil national de la Résistance». La cohérence suppose qu'il en fasse la démonstration.