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Libération
Loi travail

Vigilance accrue des services d’ordre syndicaux pour la manifestation de mardi

Les membres des services d’ordre des syndicats appréhendent la manifestation de mardi contre la loi El Khomri. Plusieurs d'entre eux avaient été blessés lors de la manifestation parisienne du 12 mai.

Des membres du service d'ordre syndical de la CGT utilisent des bombes lacrymogènes lors d'affrontements avec d'autres manifestants le 12 mai 2016 à Marseille (Photo BERTRAND LANGLOIS. AFP)
Par AFP
Publié le 16/05/2016 à 15h52

«Je ne vois pas en quoi une caissière militante qui fait SO est une collabo»: les services d'ordre syndicaux (SO), surpris par les violences dont ils ont fait l'objet lors de la manifestation du 12 mai, promettent une vigilance accrue avant les nouvelles mobilisations contre la loi travail mardi.

«On s'est déjà fait insulter par le passé, mais ça n'a jamais été violent à ce point. On n'est ni formé, ni équipé face à une telle violence», assure à l'AFP Jacques, responsable SO de la CGT en Ile-de-France, quinze ans d'expérience, qui préfère garder partiellement l'anonymat. Il dit appréhender la manifestation de mardi à Paris, qui partira de l'Ecole militaire à 14h00 pour se diriger vers les abords du Sénat. La CGT, qui compose le gros des troupes des services d'ordre, a lancé un appel à des militants volontaires «pour être beaucoup plus nombreux que jeudi». Mais aucun dispositif particulier n'a été mis en place.

Le 12 mai, la manifestation parisienne à l'appel de sept organisations syndicales opposées à la loi travail (CGT, FO, Solidaires, FSU, Unef, UNL, Fidl) s'est déroulée dans un contexte particulièrement tendu. En tête de cortège, en plus des slogans habituels contre la loi travail, ont fusé des insultes contre les SO («SO collabos») et des casseurs s'en sont pris à eux en fin de manifestation. Bilan, dix blessés à la CGT et trois chez FO, selon les syndicats.

«Je ne vois pas en quoi une caissière dans un supermarché, militante, qui fait SO pendant une manif est une collabo», s'insurge Emmanuelle Bigot, guichetière à la SNCF et SO pour Solidaires, qui sera «plus vigilante» mardi qu'à l'accoutumée.

«Sentiment anti-police»

Les syndicats lient les violences dont ils ont fait l'objet le 12 mai à un communiqué de la préfecture de police de Paris diffusé la veille, indiquant qu'une rencontre avait eu lieu entre les deux parties «afin d'apporter le maximum de sécurité et de garantir le bon ordre de cette manifestation». Ces réunions sont courantes avant chaque manifestation, mais jamais la préfectu e n'avait communiqué à ce propos, soulignent les syndicats. «Nous avons trouvé ce communiqué scandaleux parce qu'il faisait croire à une co-production entre préfecture de police et syndicats pour encadrer la manifestation, dans un contexte de sentiment anti-police», dit Frédéric Bodin, responsable SO chez Solidaires. «Ce communiqué n'est en aucun cas un communiqué commun. Le dispositif de sécurité appartient à la préfecture de Paris», insiste Jacques.

De source policière, on explique que ce communiqué «devait avoir un effet dissuasif sur les casseurs» et que le dispositif a bien été mis en place «en accord» avec les syndicats. Vendredi, Michel Cadot, le préfet de police de Paris «a regretté vivement» que des membres des SO aient été blessés.

Apprentissage «sur le tas»

Créés dans les années 1920 par les organisations syndicales, les services d'ordre ont pour principale mission d'encadrer les manifestations. «Nous ne sommes pas des professionnels de la sécurité. Il y a des infirmiers, des instituteurs, des travailleurs de la ville de Paris…», explique Emmanuelle Bigot, qui voit sa mission comme une «continuité de son action syndicale de déléguée du personnel». La formation SO prévoit, chez Solidaires, des cours juridiques (sur la garde à vue), les premiers gestes de secours ou encore la pratique de la marche en chaîne... Une seule condition : être cadre au sein de l'organisation syndicale.

A la CGT, on apprend «sur le tas». Pas de condition physique requise. «Personne à la CGT n'est payé pour "faire" SO. Il y a des jeunes, des vieux, des hommes, des femmes, des retraités. Beaucoup d'entre nous sont délégués dans des entreprises», précise Jacques. L'image d'un service d'ordre qui serait très structuré «est une grande légende», assure-t-il. «Certains nous assimilent à des forces de police. On fantasme sur une organisation composée de dizaines, voire de centaines de personnes, or nous sommes deux-trois sur la région parisienne à avoir un mandat SO. Pour les manifestations, on fait appel à des militants qui veulent bien nous aider».