A droite, l’unanimité autour d’un compromis sur l’organisation du vote des expatriés aura permis d’éviter un clash majeur entre Nicolas Sarkozy et ses concurrents dans la primaire de novembre. Ce dénouement ne met pourtant pas fin à la pittoresque querelle déclenchée par l’ancien chef de l’Etat. Le feuilleton continue. Et les prochains épisodes sont assez prometteurs.
Pour mémoire, Sarkozy avait provoqué la crise le 3 mai, en remettant soudain en cause le principe d'un vote électronique pour les Français établis hors de France. Ce principe, retenu pour des raisons logistiques et juridiques, créait selon lui une insupportable «rupture d'égalité» entre ceux qui peuvent choisir leur candidat d'un simple clic et les Français de France obligés, eux, de se déplacer dans un bureau de vote. Pour le camp Sarkozy, cela favorisait une «surreprésentation» des expatriés, voire une mobilisation contre-nature «d'électeurs de gauche».
Compromis baroque
Les candidats à la primaire, Juppé en tête, ont protesté si fort que le chef de LR a dû accepter mardi soir un compromis baroque : le vote électronique reste la règle et l’ouverture de bureaux de votes sera envisagée dans les trente villes étrangères où sont recensés plus de 15 000 Français. La commission d’organisation présidée par Thierry Solère se donne deux mois pour vérifier, ville par ville, où cela sera effectivement possible. Chaque fois que cela ne le sera pas, le vote électronique s’imposera. Les exceptions risquent d’être nombreuses.
Pour des raisons de sécurité, il ne sera peut-être pas raisonnable de provoquer des rassemblements d’électeurs français dans les rues d’Alger, Tunis, Beyrouth ou Dakar… Dans d’autres villes, les problèmes logistiques seront si lourds que la commission renoncera à faire compliqué là où elle peut faire simple. Dans d’autres encore, il sera difficile de trouver, parmi les expatriés, les volontaires qui accepteront de tenir les bureaux de vote. Ce pourrait par exemple être le cas à Bruxelles où la remise en cause du vote électronique a exaspéré la communauté française.
Enfin, et surtout, la commission Solère devra rayer de sa liste les villes de pays qui interdisent formellement les activités d’un parti politique étranger sur leur sol. C’est le cas du Canada, de la Chine et peut-être même de l’Allemagne. Ce dernier point a été évoqué mardi soir devant le bureau politique de LR. Pourra-t-on ouvrir des bureaux à Berlin et Francfort ? Nicolas sarkozy aurait promis, devant un haut responsable de la droite, d’en parler, si besoin, avec son amie Angela Merkel, qu’il doit rencontrer le 21 juin. C’est dire combien cette affaire lui tient à cœur… Selon un diplomate français, il n’est pas certain d’obtenir satisfaction, car la République fédérale n’envisagerait qu’avec prudence de donner aux Français des droits qu’elle ne pourrait plus, dès lors, refuser à d’autres résidents étrangers, notamment aux Turcs.
Au final, c'est la Haute autorité de la primaire, présidée par la juriste Anne Levade, qui validera le 15 juillet la liste définitive des villes qui pourront ouvrir des bureaux de vote. Il y a fort à parier qu'elles ne seront pas nombreuses. En toute hypothèse, le bilan de cette offensive sur le vote des étrangers à la primaire est donc désastreux pour Nicolas Sarkozy. La question de la «rupture d'égalité» qui avait servi de prétexte à son offensive n'est absolument pas réglée par le compromis de mardi. Et non content de se mettre à dos un nombre considérable d'expatriés, le patron de LR aura offert à ses rivaux une nouvelle occasion démontrer que le parti n'a plus son mot à dire sur l'organisation de la primaire.