L'un veut «légiférer». L'autre estime que «la loi n'est pas la bonne méthode». Après la publication dans Libération ce jeudi d'un appel de 40 personnalités à légiférer pour limiter les rémunérations des grands patrons, le Premier ministre, Manuel Valls, a déclaré que son gouvernement était prêt à en passer par la loi. «Nous avons fait le choix dans un premier temps de mettre les entreprises face à leurs responsabilités, en l'occurrence le patronat. Force est de constater que cela n'a pas été respecté. Donc maintenant, il faut légiférer», a-t-il expliqué ce jeudi matin sur RTL.
«Risque d’inconstitutionnalité»
S'il ne semble pas prêt à reprendre l'idée, portée dans Libération, d'interdire les rémunérations des grands patrons au-dessus de 100 Smic, cette proposition, soutenue désormais par le Parti socialiste, «montre bien le chemin qu'il faut prendre». Mais puisque, selon lui, «il y a aussi des risques d'inconstitutionnalité», le chef du gouvernement préfère l'idée avancée mardi sur Europe 1 par François Hollande : sans intervention «vigoureuse» du patronat, a prévenu le chef de l'Etat, «la première décision qui sera prise [dans le cadre d'une loi, ndlr] c'est que toutes les décisions des assemblées générales seront immédiatement exécutoires. Par conséquent, le conseil d'administration ne pourra pas défaire ce que l'assemblée générale d'actionnaires aura fait», comme cela avait été le cas dans l'affaire de la rémunération du PDG de Renault, Carlos Ghosn. Un amendement à une proposition de loi Front de gauche a d'ailleurs été adopté en ce sens mercredi par la commission des Affaires sociales de l'Assemblée.
«Dans le projet de société que je défends, bien sûr qu'il n'est pas immoral de bien gagner sa vie. Mais ce qui est immoral, ce sont ces rémunérations, de s'augmenter de cette manière sans se rendre compte des dégâts que cela peut représenter», a quant à lui ajouté Manuel Valls jeudi. Ce n'est pas l'avis de son ministre de l'Economie. Une fois de plus, Emmanuel Macron s'est démarqué du Premier ministre en expliquant, devant une conférence d'investisseurs, qu'en passer par la loi ne lui semble «pas la bonne méthode». «C'est au monde économique de montrer qu'il est à la hauteur de cela, a-t-il expliqué, sinon, celles et ceux qui proposent aujourd'hui une loi seront légitimes dans quelque temps à la faire.»