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Libération
EDITORIAL

Bras de fer

publié le 26 mai 2016 à 20h41

Y a-t-il une porte de sortie ? Quoique située à un niveau modéré, la mobilisation dans la rue se maintient et progresse même légèrement en regard de la dernière manifestation. En fait, l’importance de la protestation découle surtout des blocages organisés par la CGT dans les secteurs où elle est forte. Le bras de fer va-t-il continuer jusqu’à l’été, ou bien, par des moyens obliques ou discrets, un dialogue va-t-il s’engager ? Une chose est claire : à moins de mettre à genoux le gouvernement socialiste en paralysant le pays, la CGT n’obtiendra pas le retrait pur et simple du texte, ce qui est son objectif officiel. Dans ce cas, elle humilierait l’exécutif et, surtout, elle annulerait les parties du texte qui accroissent les droits des salariés, comme le mandatement syndical dans les petites entreprises ou encore le compte personnel d’activité. Faut-il rappeler que la CFDT, l’autre grand syndicat, tient essentiellement à voir ces dispositions nouvelles entrer en vigueur rapidement ? Surtout si un gouvernement de droite venait à succéder dans un an à celui de Manuel Valls… En revanche, plusieurs députés socialistes, et certains au sein du gouvernement, cherchent à élaborer des dispositions qui garantiraient aux travailleurs leur pouvoir d’achat en cas d’accord d’entreprise différent des conventions collectives. Sans changer la philosophie du projet, qui prévoit de toute manière une décentralisation des négociations sur le temps de travail, l’amodiation du texte serait propre à rassurer ceux qui craignent des phénomènes de dumping social.

Encore faut-il trouver une instance pour en discuter. Cela ne peut pas se faire sur un trottoir en fin de manifestation… Or il existe un lieu tout désigné pour réfléchir collectivement à cette évolution du texte : le Parlement de la République française. Plutôt que de se battre à coups de 49.3 et de motions de censure, de gauche ou de droite, les députés seraient bien inspirés de reprendre la main, non pas pour dégager immédiatement un compromis, mais pour relancer le processus de dialogue qu’il avait déjà entamé avant le premier vote sur la loi El Khomri. L’exécutif peut-il indiquer au mouvement social cette issue, incertaine, certes, mais démocratique ? On croit le comprendre au milieu d’une communication quelque peu embrouillée. Il est temps de clarifier.