Fondateur de Canal+, propriétaire du groupe de taxis G7, patron d’Havas, directeur de cabinet de Mitterrand à l’Elysée, député… Homme clé d’une époque révolue, André Rousselet est mort à 93 ans, dimanche.
La carrière extraordinaire de ce sous-préfet de formation s'est inscrite dans le sillage de François Mitterrand. Il entre au cabinet du futur président au ministère de l'Intérieur, en 1954. C'est le début d'un long compagnonnage. Rousselet est l'un des principaux relais dans les milieux d'affaires de Mitterrand, dont il fut aussi l'exécuteur testamentaire. Il se charge du financement des campagnes, comme il l'a raconté dans ses mémoires, en 2015 : «De tous les financiers qui se sont occupés de campagnes électorales, le seul qui soit sorti indemne de son travail dans l'obscurité, c'est moi. […] J'ai simplement été plus discret.»
Côté affaires, l’homme est connu pour avoir fait de la modeste compagnie de taxis G7, reprise en 1960, un groupe qui pesait près de 300 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2014.
Mais il restera sans doute dans l'histoire pour avoir été celui qui a créé Canal+ en 1984 avec l'encouragement appuyé de Mitterrand. Le fameux «esprit Canal», qui a sans doute disparu bien avant la reprise en main par Bolloré, est en partie son œuvre. «Il est l'un de ceux qui ont façonné l'audiovisuel en France», dit Marc Tessier, ex-président de France Télévisions. L'aventure s'achève en 1994, lorsqu'il doit démissionner de la présidence de la chaîne après que les actionnaires s'entendent pour le pousser dehors. Dans une tribune titrée «Edouard m'a tuer», il accuse le gouvernement Balladur d'avoir orchestré son éviction.
Il se console en investissant dans le quotidien Infomatin, sans succès, puisqu'il dépose le bilan le 8 janvier 1996, le jour de la mort de Mitterrand. «Il était fasciné par la presse, se souvient le directeur éditorial d'Arte, Bruno Patino. C'était quelqu'un d'abrupt parfois, mais très séduisant et séducteur en privé, intelligent et cultivé.»