Jeudi, lors de l’ouverture du congrès du PCF, à Aubervilliers, on a assisté à une belle scène. Digne d’une pièce de théâtre. Après plusieurs mois sans se donner de nouvelles, Jean-Luc Mélenchon et Pierre Laurent se sont retrouvés. Un câlin, des bisous. Le tout, sous les flashs. Puis, après un petit moment au milieu des communistes et un autre dans le bureau de Pierre Laurent, Mélenchon, accompagné de sa petite bande, s’est envolé. Sans câlin ni bisous. Retour à la réalité.
Tête baissée. Entre les deux, un désaccord tenace : la présidentielle. D'un côté, Mélenchon, qui a annoncé sa candidature dès le 10 février, avance tête baissée sans se retourner. Les sondages, entre 10 % et 14 %, lui donnent de la force. De l'autre, Pierre Laurent lui demande de ralentir. Le secrétaire national du PCF rêve de surfer sur la mobilisation sociale pour rassembler toutes les forces de gauche qui s'opposent à la politique du gouvernement. De la gauche radicale aux frondeurs socialistes. Objectif : «Présenter un socle commun et une candidature commune», explique à qui veut l'entendre le secrétaire national du PCF.
D'ailleurs, à Aubervilliers, la présidentielle occupe les esprits. La stratégie de Pierre Laurent ne séduit pas tous les militants de son parti. Pour preuve, le mois dernier, le texte présenté par la direction en vue du congrès a obtenu 51,2 % des suffrages : un tout petit score pour la place du Colonel-Fabien. Certains plaident pour une candidature communiste autonome, d'autres pour monter dans le train Mélenchon. Un opposant : «Pierre a laissé du monde sur la route avec son histoire de primaire. On ne savait pas trop s'il voulait une primaire avec [ou sans] Hollande, alors que, pour la majorité des communistes, c'est hors de question pour la première option. On ne veut plus rien avoir à faire avec les socialistes.» Dans le camp Laurent, on relativise : «On trouvera une piste d'atterrissage le moment venu. Jean-Luc Mélenchon ? Une autre personne de gauche ? Une candidature du PCF ? Personne ne connaît la réponse aujourd'hui.» Une convention nationale est programmée en novembre pour fixer la stratégie du parti. D'ici là, Pierre Laurent, qui joue la montre, va multiplier les contacts pour trouver une porte de sortie, qui n'a rien d'évidente.
Au milieu des interrogations et de la poussée Mélenchon qui irrite la direction du PCF, une troisième voix commence à se faire entendre. Celle de Clémentine Autain. La porte-parole de Ensemble, troisième composante du Front de gauche, tente d'organiser un meeting, dans les prochains jours, pour réunir toutes les personnalités de gauche qui «s'opposent à l'état d'urgence et la loi travail» : «Il faut poser des actes communs pour se réunir et éviter de multiplier les candidatures en 2017. Il ne faut pas se noyer dans la rancœur du passé.»
Pique-nique. Dimanche, après trois jours de débats pour rédiger la nouvelle ligne du parti, Pierre Laurent sera élu pour un second mandat à la tête du PCF. Son dernier tour de piste avant de rendre son tablier. Après ses mots, un petit pique-nique est prévu avec les militants. Au même moment, à quelques kilomètres de l'autre côté du périphérique, Mélenchon sera, lui, à Paris, place Stalingrad, pour le premier grand rassemblement de campagne de ses «Insoumis». Laurent, qui joue des coudes pour gagner de la place dans les médias, l'accuse d'ailleurs d'avoir organisé sa manifestation le jour de la clôture du congrès du PCF. On est davantage dans la cour de récréation que dans la camaraderie.