Dans les manuels, militaires comme sportifs, on appelle ça pousser son avantage. Persuadés de l’essoufflement du mouvement social, les chefs de la majorité ont décidé d’unir leurs forces pour organiser… un meeting pour défendre la loi travail. Alors que les déplacements ministériels sont tous plus ou moins perturbés par les opposants au projet El Khomri depuis deux mois, Manuel Valls, Stéphane Le Foll, Jean-Christophe Cambadélis et la ministre du Travail feront estrade commune mercredi soir à Paris. Ce qui s’appelle serrer les rangs quand les frondeurs socialistes, eux, continuent à faire monter les enchères.
Puisque l'exécutif n'entend pas bouger d'un iota sur le projet de loi avant son retour en deuxième lecture à l'Assemblée en juillet, il faut bien occuper l'espace politique pendant que le Sénat examine le texte. D'où un intitulé alambiqué pour ce meeting où 200 à 300 personnes sont attendues : «Face aux régressions de la droite sénatoriale, défendons le progrès social.» Plutôt défensif qu'offensif même si cela permettra surtout de faire une photo de famille rassemblée. Une sorte d'union nationale entre hollandais et vallsistes. «Au moment où la droite nous offre la possibilité de démontrer que eux et nous ce n'est pas pareil, et alors que le PCF est en crise et les Verts ne sont pas aux mieux, il fallait parler aux nôtres», explique Jean-Christophe Cambadélis.
Vu l'état de la gauche à un an de la présidentielle, aucun des deux camps ne peut faire cavalier seul. «Je ne sais pas si c'est le lancement de la pré-campagne présidentielle mais c'est définitivement une façon d'installer un autre climat à gauche», explique le député PS, Carlos Da Silva, fondé de pouvoir de Valls dans l'organisation collective.
Meeting de la fierté socialiste début juillet
«Il faut multiplier les rassemblements sur des messages positifs, sur la fierté du bilan et le clivage gauche-droite», confirme-t-on dans l'entourage de Le Foll, laissant flotter un petit parfum de thérapie de groupe socialiste sur l'entreprise. «A partir du moment où tu trouves un peu d'oxygène, tu ne te justifies plus et tu reprends de l'élan», espère un conseiller ministériel à l'heure où les sondages plongent toujours plus bas. Mais après la réunion publique de mardi, chacun reprend sa route de son côté. Manuel Valls préside une nouvelle «rencontre avec les Français» dès jeudi sur le thème de la culture puis un banquet républicain le 26 juin en Seine-Maritime. Le très hollandais Stéphane Le Foll, lui, embraie avec deux nouveaux meetings de Hé oh la gauche mi-juin. Un rythme de croisière qui devrait culminer à deux par semaine avant la pause estivale.
Tous les mouvements parallèles lancés au sein de la majorité et pilotés par ces différents chefs à plumes ont été priés de converger à nouveau pour se mettre au service collectif et unique de François Hollande. La Belle Alliance populaire du patron du PS, Hé oh la gauche de Stéphane Le Foll, Manuel Valls, ainsi que la campagne «Du progrès en plus» lancée par le chef des députés PS, Bruno Le Roux, fusionneront donc le 2 juillet pour un grand meeting commun au Gymnase Japy.«C'est vers la belle alliance que tout converge», se félicite son initiateur Jean-Christophe Cambadélis.
«Hollande ne donne jamais de consignes, comme à son habitude, donc ça partait dans tous les sens, se désole un de ses proches. Mais la récré est finie, on met tout le monde dans un seul bateau pour 2017.» Un conseiller présidentiel abonde : «Que cent fleurs s'épanouissent, c'est bien beau. Mais à un moment, il faut centraliser un peu.»