Sur le papier, Alain Juppé est le plus redoutable adversaire de Marine Le Pen en vue de l'élection présidentielle, celui à qui tous les sondages promettent une large victoire face à la candidate frontiste. C'est pourtant un duel face à lui que celle-ci semble appeler de ses vœux dans un entretien publié ce mardi sur le site de l'Opinion. «Oui, ce serait sain que se retrouvent face à face deux personnalités qui ont des visions aussi opposées», juge Marine Le Pen. Selon l'eurodéputée, Alain Juppé «est tellement le symbole de ce système que nous combattons que sa candidature pourrait accélérer le processus de recomposition de la vie politique auquel j'aspire. D'un côté, l'UMPS, mondialiste, post-national. De l'autre côté, les patriotes, attachés à la nation dans toutes ses composantes. Paradoxalement, Alain Juppé pourrait accélérer cette recomposition salutaire».
«Nicolas Sarkozy, c’est Barbapapa»
Si plusieurs responsables frontistes confient ne pas croire en une victoire «bleu marine» l'année prochaine, c'est bien sur une telle «recomposition» que mise la direction du parti d'extrême droite. Le processus verrait la frange la plus droitière de LR se détacher d'un mouvement trop «recentré» par Alain Juppé, et jeter des ponts vers le Front national. «Nicolas Sarkozy, c'est Barbapapa : il peut se transformer en patriote, en centriste, en immigrationniste ou en opposant à l'immigration, poursuit Marine Le Pen. N'ayant pas de colonne vertébrale, il fait fi de toute sincérité ou conviction, il s'adapte. Alain Juppé ne pourra pas camoufler ce qu'il est. Et ce qu'il est, c'est l'inverse de ce que je suis.»
Dans l'attente d'un tel scénario, c'est sa propre base que va devoir élargir le FN, régulièrement contre-performant lors des seconds tours électoraux. Pour cela, le parti souhaite particulièrement rassurer des segments électoraux encore rétifs à son égard. «Les femmes et les personnes âgées sont souvent les plus sensibles aux campagnes de diabolisation organisées contre le Front national», juge Le Pen. La future candidate souhaite poser son mouvement comme le seul à pouvoir «défendre les libertés individuelles, notamment les libertés des femmes aujourd'hui menacées». Une stratégie qui explique les récentes tensions autour de Marion Maréchal-Le Pen, tenante d'une ligne plus dure en matière sociétale.