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Libération
EDITORIAL

Ordre des facteurs

Paris, mardi. En tête de la manif: Jean-Claude Mailly et Philippe Martinez. La CGT elle-même, et tous les syndicats responsables, condamnent les méfaits des casseurs. (Photo Albert FACELLY pour «Libération»)
publié le 15 juin 2016 à 20h51

Il ne faut pas inverser l’ordre des facteurs : si la violence s’est installée en marge des défilés hostiles à la loi travail de Myriam El Khomri, c’est d’abord et avant tout en raison de l’action délibérée, concertée, systématique, de petits groupes activistes à la stratégie nébuleuse, qui pensent - à supposer qu’il s’agisse d’une pensée - qu’agresser des policiers et détruire des devantures fait avancer la cause des travailleurs. Alors que les débordements répétitifs - couronnés par l’attaque imbécile d’une façade d’hôpital, une première dans l’histoire des manifestations françaises - n’ont d’autre effet que d’éroder le soutien apporté par une partie de l’opinion à la protestation et donc d’affaiblir le mouvement syndical que l’on prétend épauler. Sans parler de la mobilisation d’effectifs de police qui seraient mieux employés à prévenir d’autres formes de violence, celles qui émaillent les avant ou les après-matchs de l’Euro, et surtout celles, autrement angoissantes, que perpètrent ou méditent les terroristes de l’Etat islamique.

Dans ces conditions, il est parfaitement logique qu’un exécutif, quel qu’il soit, tienne un langage de fermeté. La CGT elle-même, et tous les syndicats responsables, condamnent les méfaits de ces minorités. Alors le gouvernement, qui est chargé de maintenir l’ordre démocratique… A une nuance près : autant la sanction des déprédateurs est justifiée, autant la menace d’une interdiction générale de manifester est exagérée. Ce serait faire porter au mouvement social, quoi qu’on pense par ailleurs de ses buts, la responsabilité d’agissements qui ne sont pas de son fait. La violence antidémocratique ne doit pas faire reculer la démocratie, dont les principes et les procédures doivent être maintenus, même dans des circonstances difficiles. Ce serait, sinon, rendre des points aux activistes que l’on dénonce.