Comment vendre le Grand Paris aux investisseurs étrangers ? En réunissant les ambassadeurs de leur pays d’origine dans les locaux chamarrés du Quai d’Orsay. Ce jeudi matin, dans le cadre du Club des entrepreneurs, le préfet de la région Ile-de-France, Jean-François Carenco, a entrepris d’expliquer à un aréopage d’une soixantaine de diplomates l’intérêt de la métropole parisienne pour les capitaux internationaux.
En mars, lors du Marché international professionnel de l'immobilier, le ministre de l'Economie, Emmanuel Macron, avait préparé le terrain en annonçant le lancement d'une consultation sur les «hubs» du Grand Paris, soit quelques sites clés. La consultation est maintenant baptisée «inventons la métropole», et porte aussi sur une cinquantaine de lieux plus modestes présentés par les villes. Le futur métro du Grand Paris Express va générer «140 kilomètres carrés d'aménagement», a dit le préfet. «On ne peut pas les laisser se construire au hasard.» Le lancement aura lieu en septembre. «La disponibilité monétaire est là», a-t-il résumé, en évoquant les abondantes liquidités qui circulent dans le monde à la recherche de terrains d'atterrissage. «A nous de savoir l'utiliser.»
«Des communautarismes, on en trouve partout»
Mais ces propos à forte teneur économique sont intervenus à la fin d'une réflexion comme on n'en entend pas souvent dans la bouche de hauts fonctionnaires. Certes, il s'agissait de faire comprendre l'idée métropolitaine à un cercle de non-spécialistes. Mais quand même… «Je vais essayer de vous faire partager l'ambition de la métropole, a posé d'emblée Jean-François Carenco. La métropole, ce n'est pas une grande ville. C'est un territoire nécessairement rayonnant, métissé, ouvert. Création de valeur, lien social, émotion culturelle : c'est ça, le fondement de la métropole.» Pour lui, les mutations que nous vivons débouchent sur un monde nouveau, «comme la Renaissance au XVe siècle. Dans ces périodes-là, il y a un certain nombre d'individus qui jouent le communautarisme, le repli sur soi, qui disent "je ne veux pas d'un monde qui bouge". Des communautarismes, on en trouve partout, même dans les syndicats, les immeubles, les associations de golf… Il n'y a qu'un moyen de lutter contre ces obscurantismes : c'est d'allumer la lumière. Et ce sont les métropoles qui allument la lumière.»
La base de la métropole, «c'est l'innovation». Il prend en exemple la floraison des incubateurs et autres structures d'accueil des jeunes pousses, «créées par ces jeunes qui se demandent d'abord ce que la société attend et non pas ce qu'il faut lui proposer». Ou lui imposer : «Dans la métropole de demain, poursuit-il en évoquant l'urbanisme, on ne peut plus faire des zonages. Cette conception de la ville est morte. Il faut interdire les spécialisations.»
«La France est multiraciale»
Après avoir résumé les projets de transport, les atouts des pôles économiques comme La Défense ou de recherche comme le plateau de Saclay, le campus Condorcet ou la cité Descartes, le préfet en vient à la culture. «Il n'y a pas de métropole sans création d'émotions culturelles.» Et de citer en exemple le projet de Villa Médicis à Clichy-sous-Bois, dont la préfiguration démarre, ainsi que «le mariage des zones de sécurité prioritaires avec les grandes institutions culturelles comme le Louvre ou la Bibliothèque nationale de France».
Au représentant de l'ambassade de Russie qui lui demande «un centre culturel dans un quartier difficile, c'est quoi l'idée ?» le préfet Carenco a cette réponse : «La France est clairement multiraciale, diverse, pays d'accueil. Si nous voulons que cela marche, il faut que chacun soit partie de la culture. Cette culture française est en pleine évolution. Dans les zones de sécurité prioritaires, nous ne faisons pas de l'action culturelle, nous disons aux habitants qu'ils peuvent être acteurs de cette excellence culturelle. Et parallèlement, nous montrons à tous les imbéciles qui veulent exclure que tout le monde peut participer à l'aventure moderne de la culture.»
Comme le rappellent souvent les urbanistes, le Grand Paris, ça n’est pas qu’un grand métro.