C'est parti. Moins de trois jours après l'annonce dans Libération par le patron du Parti socialiste, Jean-Christophe Cambadélis, d'une primaire à gauche, voilà les socialistes les plus opposés à la ligne Hollande-Valls qui s'agitent. Depuis plusieurs mois, ils sont nombreux à ajuster leurs starting-blocks, sans dire s'ils y prendront vraiment part ou bien s'il s'agit d'un coup de bluff destiné à bien se placer dans cette course destinée à désigner, les 22 et 29 janvier 2017, un candidat commun à la présidentielle. Samedi, à l'issue du conseil national du PS décidant de la primaire, le premier secrétaire interrogé sur le risque que prendrait François Hollande à se présenter à la primaire, en a profité pour ironiser sur la quantité d'ambitions à l'aile gauche de son parti : «C'est un risque aussi pour Benoît Hamon, vraisemblablement ; un risque pour Arnaud Montebourg, assurément ; un risque pour Marie-Noëlle Lienemann, certainement ; un risque pour Gérard Filoche, je le pense». «On va se réunir calmement et décider de la meilleure offre politique à proposer. Si on veut que les choses changent, il faut un seul candidat», fait valoir un des responsables de la minorité du PS, assurant au passage que les choses vont «mûrir» durant l'été.
Arnaud Montebourg se fait désirer
«Une hypothèse parfaitement plausible». Ce lundi matin sur Europe 1, l'ex-ministre de l'Economie viré du gouvernement à l'été 2014 a semé une graine de plus dans le champ censé le ramener vers l'Elysée. Mais celui qui a quitté le gouvernement en prenant «exemple sur Cincinnatus, qui préféra quitter le pouvoir pour retourner à ses champs et à ses charrues», a «encore un certain nombre de questions à poser». L'architecte et troisième homme de la «primaire citoyenne» du PS en 2011 (17%), souhaite ainsi s'assurer que son parti – avec lequel il a pris ses distances – organise bien une «primaire des citoyens, c'est-à-dire que tous les Français peuvent venir, pas seulement les Français qui auraient une carte ou des Français qui se reconnaîtraient dans tel ou tel appareil». «Ça doit être une primaire sur la base des listes électorales, a-t-il insisté. J'attends que ces règles soient fixées, qu'elles soient établies, que nous en connaissions les modalités, que nous imaginions, y compris ce que l'on appelle l'unification.» En attendant son rendez-vous annuel à Frangy-en-Bresse le 21 août, Montebourg compte bien poursuivre la préparation de son «Projet France», lancé au Mont Beuvray mi-mai : «Face à François Hollande, je suis entièrement déterminé à proposer un projet alternatif, parce que la France en a besoin et que la primaire est l'occasion de faire ses propositions originales, créatives et innovantes», a-t-il ajouté lundi matin sur Europe 1.
Marie-Noëlle Lienemann déjà candidate
«Eux hésitent, attendent, moi je sais où je vais.» Samedi, en marge du conseil national du PS décidant de la mise en route d'une primaire à gauche, la sénatrice de Paris se félicitait ainsi d'être partie avant tous ses camarades. «Je savais qu'on finirait par organiser une telle désignation quand on est dans une telle crise politique et que 85% des Français demandent des primaires», faisait-elle valoir devant la Maison de la chimie à Paris. Ce jeudi matin sur RFI, l'ex-ministre du Logement sous Bérégovoy puis Jospin a confirmé qu'elle était candidate. Il y a quelques jours sur Libération.fr, elle mettait en garde sa direction contre un «coup d'Etat permanent» en cas de non-primaire. Lienemann a déjà lancé un site «participatif» et, comme le fait remarquer un haut responsable rue de Solférino, «elle n'a pas pour habitude de lâcher l'affaire». Paroles de connaisseur.
Benoît Hamon attend un signe
Lui aussi avait déjà mis un petit caillou sur le chemin qui mène à 2017. C'était dans L'Humanité, début septembre 2015 : «Oui. S'il devait y avoir une primaire à gauche, je n'exclus pas d'y participer», avait déclaré l'ex-membre du gouvernement, parti à l'été 2014 avec Montebourg. Depuis, le député des Yvelines, actif à l'Assemblée nationale pour s'opposer au projet de loi réformant le code du travail, est resté discret sur le front de la primaire. Tout juste a-t-on eu quelques échos d'une réunion, début avril à Paris, au cours de laquelle Benoît Hamon a informé ses plus proches soutiens qu'il serait candidat. «Et pas seulement à la primaire», faisait alors valoir un responsable de l'aile gauche du PS en coulisses. Qu'attend-il pour se déclarer officiellement ? «Il joue le soutien d'Aubry», croit savoir un de ses camarades, rappelant qu'il avait soutenu la maire de Lille dès le premier tour de la primaire en 2011. Mais pour les proches de l'ex-première secrétaire, l'ancien porte-parole du parti ne semble pas être une priorité.
Gérard Filoche en «défenseur des petits salaires»
Lui aussi veut y aller. Dans une interview au Point.fr dès l'annonce par Cambadélis d'une primaire, l'ancien inspecteur du travail, opposé depuis les premiers jours du quinquennat à la politique menée par ses camarades au pouvoir, a déclaré vouloir en être. «A 70 ans, je pense que je peux défendre utilement les petits salaires et les petites retraites, a-t-il expliqué. Ma candidature s'inscrit dans la continuité de l'opposition à la loi El Khomri. Moi, personne ne me fera céder. J'irai chercher les dividendes. Je ne trahirai jamais une promesse.» Comme Lienemann ou, à l'extérieur du PS, Jean-Luc Mélenchon, Filoche affiche en référence la campagne de Bernie Sanders aux Etats-Unis ou bien la victoire de Jeremy Corbyn en Grande-Bretagne pour prendre la tête du parti travailliste dans une primaire ouverte. Il en est persuadé : «Même une chèvre gagnerait contre Hollande.»