En matière d'ISF, il y a les «nuls» et «les autres». Sur son blog, le secrétaire d'Etat au Budget Christian Eckert s'est permis de donner une petite leçon de fiscalité à tous, à son collègue de l'Economie, Emmanuel Macron, en particulier.
Lors d'un colloque organisé jeudi par l'Institut Montaigne, think tank libéral, Macron a en effet redit tout le mal qu'il pense de l'impôt de solidarité sur la fortune, «problème pour celles et ceux qui voudraient investir et aider au développement économique». Echaudé par la réaction brutale de Manuel Valls lorsque, en avril, il s'était prononcé en faveur de sa suppression, le ministre s'est cette fois contenté d'en défendre la «réforme» : «Il ne faut pas taxer de la même façon le capital et le travail, le capital productif et le capital dormant», a-t-il justifié. Pour appuyer son propos, il a rappelé au parterre de dirigeants venus l'écouter son intention d'enrichir le prochain projet de loi de finances d'un «compte entrepreneur-investisseur», grâce auquel les entrepreneurs ayant cédé leur société pourront «réinvestir sans frottement fiscal»...
L'ennui, c'est qu'Emmanuel Macron n'a, semble-t-il, pas pris la peine de demander son avis à Christian Eckert, concerné au premier chef. Lequel s'est ému de cette mauvaise manière. «Secrétaire d'Etat en charge du Budget et surnommé parfois ministre des Impôts, je me sens moi aussi aujourd'hui autorisé à donner mon point de vue», écrit l'élu de Moselle sur son blog. La question de préséance réglée, Eckert entre dans le vif du sujet.
«Le rendre moins effaçable»
«Le ministre de l'Economie, qui s'exprime sur l'ISF régulièrement, a affirmé que l'ISF poserait un problème à ceux qui souhaitent investir», relève t-il pour mieux s'en étonner : «Un dirigeant d'entreprise n'est pas imposé sur la valeur de son entreprise et peut donc y investir sans contrainte. Les multiples fonds existants permettent aussi d'investir dans des entreprises en franchise d'ISF». Et le secrétaire d'Etat au Budget de remettre les pendules à l'heure : «Le produit de l'ISF est loin d'être négligeable [5,2 milliards d'euros, ndlr]. Son taux est particulièrement faible, son assiette très favorable aux contribuables […] Son seul défaut est d'être trop facile à contourner.»
Si Eckert n'écarte pas la possibilité d'une réforme de l'ISF, c'est au nom de l'«équité» : «Le rendre moins "effaçable" est sans nul doute nécessaire». Avec le «compte entrepreneur-investisseur», dispositif annoncé en février par Valls mais précisé et défendu par Macron, c'est le contraire qui est au programme.