Au premier jour des débats devant le tribunal correctionnel de Paris, à la fin du mois de mai, Karim Mohamed-Aggad avait demandé un «procès équitable», sans «amalgame». «On choisit ses amis, pas sa famille», avait-il lancé aux juges, pressentant que son nom serait un fardeau supplémentaire dans ce procès où il comparaissait aux côtés de six autres copains de Strasbourg, âgés de 24 à 27 ans, pour «association de malfaiteurs en vue de la préparation d'un acte terroriste». Son frère, Foued Mohamed-Aggad, est en effet connu pour être l'un des kamikazes responsables de la tuerie du Bataclan.
«Tribunal aux ordres»
Lors des dix jours de procès, les prévenus comme leurs avocats ont donc tenté de chasser le spectre des attentats du 13 novembre loin de la salle d’audience. Certainement en vain. Dans le jugement rendu aujourd’hui, le tribunal a prononcé des peines sévères allant de six à neuf ans de réclusion criminelle, assortie d’une période de sûreté des deux tiers.
C'est le «frère de» qui a écopé de la sanction la plus lourde : neuf ans de prison. «Nous pensons faire appel», a immédiatement réagi son avocate Me Françoise Cotta. A ses yeux, ce jugement serait celui d'«un tribunal aux ordres qui a rendu une décision de peur dans une France qui a peur». Les sept Alsaciens ont, quant à eux, accueilli la sentence sans broncher.
Scission au sein de la bande
On retrouve dans le quantum des sanctions la distinction assez nette qui avait émergé au cours des audiences entre deux groupes : d’un côté, quatre jeunes hommes barbus souvent narquois et de l’autre, trois visages glabres et plus graves. Cette scission au sein de la bande de copains avait d’ailleurs été mise en avant par le procureur dans son réquisitoire.
Il avait réclamé dix années de détention, la peine maximale, contre le premier groupe – dont Karim Mohamed-Aggad – ayant séjourné quelques mois en Syrie, dénoncant des actes d'une «extrême dangerosité». Mais il avait demandé huit années de prison et une peine de sûreté des deux tiers contre les trois autres prévenus qui étaient restés moins longtemps que les autres en Syrie. Si tous les alsaciens avaient déclaré à l'unisson être partis combattre le régime de Bachar Al-Assad, le procureur avait estimé que les sept hommes étaient «déterminés» à rejoindre un groupe jihadiste en Syrie et que tous étaient impliqués dans des combats sur place.