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Libération
Beurre-sucre

A Montparnasse, ruée sur les terrasses

A Paris, cafés et restaurants multiplient chaises et tables à l'extérieur, dans une conquête territoriale de l'espace public qui envoie le piéton se promener ailleurs.
Le Dôme, une brasserie réputée du quartier de Montparnasse, photo non datée. (Photo AFP)
publié le 25 juillet 2016 à 15h52

Les gargotiers ont-ils perdu la boule ? On comprend bien qu’à Paris, ils ont souffert d’un printemps pourri qui ne leur a pas permis de réaliser les chiffres qu’ils auraient pu espérer en terrasse. Sans doute cette frustration explique-t-elle qu’à peine les températures remontées, ils se soient lancés dans une conquête des trottoirs sans foi ni loi.

Montparnasse, patrie des crêperies. Les rues étant ce qu’elles sont, la plupart doivent se contenter de placer dehors des petites tables pour deux. Toutes sauf une ! Le Manoir breton est au rez-de-chaussée d’un de ces immeubles que les règlements des années 1970 ont fait construire en retrait. Le chanceux Manoir a plein de place pour sa terrasse. Mais ça ne suffit pas. Allez hop, une rangée de tables en plus ! Les piétons se faufilent à la queue leu leu, avec une forte envie de piquer au passage une crêpe dans une assiette. Plus loin, les bistrots ont colonisé le trottoir de manière telle qu’en avançant, on risque toujours de bigner un serveur vu que le commerce s’étale maintenant sur deux côtés. A Montmartre, une terrasse oblige à passer entre les tables à l’égyptienne, de profil.

A Paris comme ailleurs, l’espace public est un objet de négociation permanente entre les pouvoirs publics et les multiples prétendants à son occupation. A ce jeu-là, les bistrotiers ont davantage d’atouts que les SDF pour poser leur matériel. Dont un, essentiel: la terrasse est agréable. Tous les ans, tables et chaises s’étalent, en général dans des proportions acceptables.

Cette année, c'est le délire. Pourquoi ? Mystère. En tout cas, on conseillera aux tenants de la limonade de relire le plan local d'urbanisme de Paris, qui oblige à «ne créer aucune gêne pour la circulation du public, notamment les personnes à mobilité réduite ou déficientes visuellement, ou pour les véhicules de secours (les dimensions de la terrasse ou de l'étalage dépendent de la largeur du trottoir)». Et on ajoutera que cette lecture serait salutaire pour les élus aussi.