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Neutralité en entreprise ou «emplois musulmans», où placer le curseur ?

publié le 25 juillet 2016 à 20h31

Inscrire le principe de neutralité dans le règlement intérieur d'une entreprise pour restreindre la manifestation des convictions des salariés : une très mauvaise idée, selon l'Observatoire de la laïcité et la Commission nationale consultative des droits de l'homme. C'est pourtant ce que prévoit un article ajouté par le Sénat fin juin au projet loi travail, qui vient d'être adopté. A moins que le Conseil constitutionnel ne le retoque il entrera donc en vigueur.

Selon cet article, l'entreprise n'a toutefois pas le champ totalement libre. Les restrictions à la liberté d'expression doivent être «justifiées par l'exercice d'autres libertés et droits fondamentaux ou par les nécessités du bon fonctionnement de l'entreprise et […] proportionnées au but recherché». Mais ce cadre est jugé insuffisant par les deux institutions qui demandent sa suppression. Parmi leurs craintes : le risque d' «insécurité juridique» lié à l '«ambiguïté» du texte mais aussi «d'éventuelles discriminations […] et en retour développement d'entreprises communautaires». Des enjeux qui font déjà débat dans certaines entreprises.

«Nous recherchons stagiaires […] hijab accepté et possibilité de faire la prière sur le lieu de travail» : sur Internet et les réseaux sociaux, de nouveaux acteurs ont choisi de cibler les actifs musulmans. Au risque de se retrouver dans une zone grise juridique. «L'idée n'est pas de dire "venez bosser entre musulmans", mais d'aider des demandeurs d'emploi à trouver une entreprise dans laquelle le voile ou la barbe n'est pas un problème», assure Fateh Kimouche, à l'initiative du projet de plateforme Al-kanz Jobs. Son principe : recevoir des CV de personnes «qui veulent vivre leur religion tranquillement au boulot» et les mettre à disposition des recruteurs. Un positionnement partagé par d'autres sites de recrutement, tels OummaWork ou encore Islamic-Job.

Face à ces nouvelles approches, les autorités tentent de construire une réponse juridique claire. «On assiste au développement de sites communautaires qui réservent l'emploi à une catégorie de personnes, ce qui est interdit en France», pointe Slimane Laoufi, chef du pôle «emploi privé» auprès du défenseur des droits.

Au-delà de l’enjeu juridique, le développement de tels sites souligne, selon le juriste Michel Miné, l’urgence de répondre aux problèmes de discrimination dans les entreprises.

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