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Terrorisme

Défense nationale : nouveau tour de garde

En réaction aux attentats, le Président a confirmé jeudi son intention de créer une organisation constituée de réservistes. Elle s’appuiera sur les réserves déjà existantes de l’armée, la gendarmerie et la police «sous un même drapeau».
Paris, le 16 novembre 2015. Déploiement des forces sécuritaires place de la République, après la proclamation de l'état d'urgence post attentats du 13 Novembre. (Photo Frédéric STUCIN pour «Libération»)
par Ismaël Halissat et Lara Roques
publié le 28 juillet 2016 à 20h41

Une «garde nationale» va bien voir le jour. François Hollande l'a officialisée jeudi. Le chef de l'Etat avait lancé cette idée après le 13 Novembre, devant le Congrès à Versailles, trois jours après les attentats : «Les réservistes sont un élément fort du lien entre l'armée et la nation. [Ils] peuvent, demain, former une garde nationale encadrée et disponible.» Depuis, le projet était resté flou, remis quelques fois sur la table, mais sans calendrier précis.

Symbole

L'attentat du 14 Juillet, à Nice, a accéléré sa création. «Le Président veut aller vite, la garde nationale devrait exister avant la fin de l'année», explique l'entourage de Hollande. Il s'appuiera sur des forces déjà constituées : les réserves opérationnelles de l'armée, de la gendarmerie et de la police nationale, désormais regroupées «sous un même drapeau», mais en conservant leur autonomie. Un projet, donc, avant tout symbolique.

Ces trois réserves opérationnelles sont constituées de citoyens issus de la société civile et d’anciens professionnels de l’armée, des forces de police et de gendarmerie. N’importe quel Français peut devenir réserviste, à condition d’avoir au moins 17 ans, d’être en bonne forme physique et de suivre une formation de deux semaines à un mois. L’armée et la gendarmerie comptent chacune plus de 28 000 réservistes, et la police environ 3 000. Ces personnes s’engagent à être disponibles entre vingt et trente jours par an, pendant un contrat d’une à quatre années. Elles sont intégrées, sur le terrain, aux missions classiques des forces de l’ordre : patrouilles, contrôle de la circulation ou encore sécurisation d’événements. Elles sont donc habilitées à porter une arme. Après le drame de Nice, le gouvernement a décidé de faire davantage appel à la réserve de la gendarmerie pour soulager la mission «Sentinelle», dont les effectifs sont fortement mobilisés depuis huit mois.

Pour constituer cette garde nationale, le président de la République s'appuie actuellement sur le travail parlementaire des sénateurs Jean-Marie Bockel et Gisèle Jourda, auteurs d'un rapport consacré à ce sujet, publié le 13 juillet. Reçu jeudi matin par le Président, Bockel se dit «confiant», même s'il n'est pas convaincu par la réunion des réserves sous une même bannière : «Il paraît difficile de mettre ensemble des institutions relevant à la fois du ministère de l'Intérieur et de la Défense. Quand on additionne les gendarmes et l'armée, on complexifie. Avec la police, c'est pire.»

Maillage

Devant la commission d'enquête sur les attentats de novembre, Bernard Cazeneuve penchait pour créer la garde nationale en s'appuyant principalement sur la gendarmerie, pour son fort maillage territorial : les réserves sont gérées au niveau départemental contrairement à l'armée, organisée par régiments. La volonté du gouvernement est d'avoir des gens disponibles rapidement, mobilisés pour des périodes courtes, près de chez eux. A l'Elysée, on explique qu'il pourrait y avoir de «petits ajustements» du côté de la réserve militaire pour améliorer ce maillage. Lors d'une réunion portant sur ce thème, en novembre, au ministère de la Défense, un très haut gradé faisait part de son sentiment : «On ne sait pas ce que veulent faire les politiques avec les réserves opérationnelles. Il faut avant tout créer de l'appétence pour les forces armées en espérant que cela ne viendra pas seulement d'un prochain attentat.»