L'affiche, photographiée dans le centre-ville de Nantes début juin, avait été largement relayée sur les réseaux sociaux. La chaîne Bagelstein annonçait l'ouverture d'une nouvelle franchise avec une publicité mettant en scène une conversation SMS factice impliquant le député écolo Denis Baupin, accusé de harcèlement et d'agressions sexuelles par plusieurs femmes quelques jours avant. La publicité a finalement valu à l'enseigne de restauration rapide de se faire recadrer par le jury de la déontologie publicitaire, dans un avis publié le 1er août, et repéré par Metronews.
Une amie est allée vérifier. @detoushorizons (cc @kvhg) pic.twitter.com/1hPUjw6DMY
— Sirène Charnue 🧜🏻♀️ (@sirenefeministe) June 3, 2016
Dans cet avis, publié en ligne, le gendarme de la publicité reproche à Bagelstein de «banalise[r] les pratiques de harcèlement et les traite[r] comme étant dépourvus de gravité, ce qui ne peut qu'avoir pour effet de porter atteinte à l'image des victimes de tels agissements, mais aussi des femmes et à leur dignité». Le jury avait été saisi début juin par le collectif féministe les Chiennes de garde et l'association Osez le féminisme !, ainsi que par des particuliers, qui reprochaient à l'enseigne de «surfe[r] sur une affaire de harcèlement et d'agressions sexuelles».
Atteinte à l'«image de la personne humaine»
Le jury épingle notamment dans sa décision le premier message de la fausse conversation («il est chaud votre trou ?»), allusion à la forme des bagels, ces pains ronds et troués en leur centre commercialisés par l'enseigne de restauration. «L'utilisation du mot "trou" pour désigner le vagin, outre qu'il est insultant pour [les femmes], les réduit à la fonction d'objet sexuel», détaille le jury, avant de conclure : «l'enseigne Bagelstein ne respecte pas les dispositions précitées de la recommandation "Image de la personne humaine" de l'Agence de régulation professionnelle de la publicité». Selon cette recommandation, «la publicité ne doit pas être susceptible de heurter la sensibilité, choquer ou même provoquer le public en propageant une image de la personne humaine portant atteinte à sa dignité et à la décence» et «ne doit pas réduire la personne humaine, et en particulier la femme, à la fonction d'objet», rappelle le gendarme de la publicité un peu plus haut dans son avis.
Après la diffusion de la publicité début juin, Bagelstein avait d'abord réagi sur le mode «on ne peut plus rien dire», qualifiant la polémique de «ridicule». «L'huile sur le feu, c'est Denis Baupin qui envoie des SMS de détraqué ! On est en train de partir dans un Etat totalitaire [sic] dans lequel on ne peut plus parler de rien», avait déclaré le patron de l'enseigne à BuzzFeed News, avant de finalement publier un communiqué présentant ses excuses – tout en évoquant une publicité «incomprise». L'avis rendu par le jury de la déontologie publicitaire, qui a le pouvoir d'interdire une campagne, ne devrait cependant pas avoir de conséquence, note Metronews, la publicité incriminée ayant déjà été retirée.