Par un arrêté du 28 juillet, la ville de Cannes (Alpes-Maritimes), dirigée par David Lisnard (LR), a interdit le port sur ses plages du burkini, ce maillot islamique féminin couvrant intégralement le corps mais pas le visage. Son voisin Lionnel Luca, député LR et maire de Villeneuve-Loubet, a fait de même. «L'accès aux plages et à la baignade sont interdits […] à toute personne n'ayant pas une tenue correcte, respectueuse des bonnes mœurs et de la laïcité, respectant les règles d'hygiène et de sécurité des baignades», stipule l'arrêté. Qui pointe sa cible en détaillant qu'«une tenue de plage manifestant de manière ostentatoire une appartenance religieuse, alors que la France et les lieux de culte religieux sont la cible d'attaques terroristes, est de nature à créer des risques de troubles à l'ordre public».
Concrètement, l’arrêté interdit donc le port d’un vêtement pourtant légal dans l’espace public, à la différence du voile intégral (burqa, niqab). En s’en prenant au burkini avant même qu’un cas ne se pose, David Lisnard ne répond pas à un problème concret, il envoie un message à ses administrés, à son électorat. Quitte à entretenir la confusion autour d’un vêtement dont le port pose nombre de questions qui ont trait au rapport au corps, au libre arbitre et même au communautarisme, sans qu’il soit nécessaire de convoquer la laïcité, l’hygiène ou la lutte contre le terrorisme.
Ce n'est pas une question de laïcité car la plage est un espace public où toute personne est libre de se vêtir comme elle l'entend. L'interdiction, votée en 2010, du port du voile intégral dans l'espace public, plages comprises, l'avait d'ailleurs été au nom de la sécurité (la dissimulation du visage) et non de la condition de la femme ou de la laïcité. Ce n'est pas une question d'hygiène et l'argument est insultant. Ce n'est pas plus une question de terrorisme, même si la ville évoque «les tenues ostentatoires qui font référence à une allégeance à des mouvements terroristes». Au-delà de l'amalgame que revêtent de tels propos ou des stratégies de dissimulation des jihadistes, on se souvient des photos d'Amédy Coulibaly, le tueur de l'Hyper Cacher, en vacances avec sa petite amie portant un bikini typique des plages cannoises. Loin du burkini honni.