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Libération
2017

Les transfuges du Modem et d’EE-LV prudents avec Macron

Les élus rassemblés autour de Jean-Vincent Placé dans l’Union des démocrates et des écologistes sont réticents à suivre l’initiative «En marche».
François de Rugy et Jean-Vincent Placé, à l'Assemblée nationale, à Paris le 4 avril. (Photo Bertrand Guay. AFP)
publié le 15 août 2016 à 19h11

L'aventure politique d'Emmanuel Macron jette aussi le trouble chez les écologistes et démocrates (anciens du Modem) pro-gouvernement. Le 12 juillet, ils étaient plusieurs «amis de Jean-Vincent Placé», sénateur, ancien EE-LV devenu président de l'Union des démocrates et des écologistes (UDE), à se mêler à la foule rassemblée à la Mutualité à l'appel du leader d'En marche et candidat putatif à la présidentielle. Christophe Madrolle, secrétaire général de l'UDE, est du nombre. Le député écologiste des Bouches-du-Rhône François-Michel Lambert aussi. Tout comme l'adjointe au maire de Lyon et porte-parole de l'UDE, Anne-Sophie Condemine. «L'UDE autorise une double, et même une triple appartenance, justifie Christophe Madrolle. Nous avons seulement répondu à l'invitation de Macron.» Certains, comme la députée écologiste Véronique Massonneau, ont préféré décliner. Le matin même, «pour faire avancer l'écologie», le député François de Rugy, coprésident de l'UDE, a, lui, officialisé son intention de se présenter à la primaire de la Belle Alliance populaire, que le PS prévoit en janvier. Dix jours plus tôt, son alter ego au sein de l'UDE, Jean-Luc Bennahmias, s'était aussi mis sur les rangs au nom du Front démocrate…

Prudence

«Entre nous, ça ne pose pas de problème, affirme Madrolle. Jean-Luc Bennahmias et François de Rugy nous avaient fait part de leurs intentions de candidater à la primaire fin juin lors d'un déjeuner au ministère de Jean-Vincent. Ça ne nous empêche pas d'aller voir Macron, de la même façon qu'on voit Valls…»

Pourtant, l'intérêt que certains manifestent au ministre de l'Economie va bien au-delà de la simple curiosité. C'est notamment vrai pour le député François-Michel Lambert qui, au titre de président de l'Institut de l'économie circulaire, confesse «travailler» depuis plusieurs mois avec Macron sur des sujets écolos. «Le 27 avril devant le Conseil national de l'industrie, il a parlé aux patrons d'économie circulaire, de la nécessité d'économiser les ressources, et leur a demandé de changer leur modèle. Jamais un ministre n'a eu ce discours», s'enthousiasme Lambert, qui semble ne pas tenir rigueur au ministre de ses propos «conservateurs» sur le diesel ou le nucléaire. Pas encore convaincu que François Hollande soit «le bon candidat» pour la présidentielle, il ajoute : «Nicolas Hulot au même âge portait moins les valeurs écologiques que Macron ! Si Macron veut passer à la vitesse supérieure, nous devons le nourrir des approches écologistes que nous portons.»

Au sein de l'UDE, la prudence reste néanmoins de mise. Question d'expérience pour beaucoup. «Ce genre de mouvement qui se lance rapidement se dégonfle souvent aussi vite, explique Jean-Luc Bennahmias qui, comme ancien des Verts et du Modem de Bayrou, sait de quoi il parle. Regardez ce qu'est devenu le mouvement de Villepin, Nous Citoyens de Cavada ou même Nouvelle Donne : rien. Je ne critique pas les essais mais je ne suis pas obligé de participer à tous !» Pour François de Rugy aussi, l'expérience Macron va faire long feu : «Macron n'a pas de schéma tactique pour la suite, parie-t-il. Or être candidat à la présidentielle, ça ne fait pas un mouvement politique dans la durée. En marche deviendra peut-être la longue marche…»

«Fous furieux»

Pour d'autres, la retenue est plus tactique. Entré au gouvernement à la faveur du remaniement de février, Placé a bien en tête ce qu'il doit à François Hollande et ce qu'il pourrait devoir au PS s'il veut conserver son siège de sénateur de l'Essonne l'an prochain. Du coup, le président de l'UDE clame urbi et orbi sa fidélité au président et au premier secrétaire du PS, Jean-Christophe Cambadélis. Un mot d'ordre très partagé en interne. «Une chose est claire : on reste loyal à François Hollande et on n'imagine pas soutenir un autre candidat que le Président s'il se présente, confirme Madrolle qui, avec Bennahmias, doit rencontrer le chef de l'Etat fin août. Notre candidat naturel, c'est lui. Je l'ai dit à Macron dans son bureau à l'Assemblée et il a compris le message. Si Hollande n'y va pas, on choisira notre candidat dans le cadre d'un congrès de l'UDE. Mais personne à l'UDE ne prend aujourd'hui parti pour Valls ou Macron.»

Même François-Michel Lambert attend de pouvoir apprécier le rapport de force : «Je ne soutiendrais jamais une personne qui se présenterait au risque de faire élire une droite dure ou extrême. Je suis élu du Sud-Est et je vois trop les dégâts que cela fait. Je le dis à Macron comme à ces fous furieux d'EE-LV.» Rassemblés à La Rochelle les 25 et 26 août, les alliés écologistes et démocrates du PS auront tout loisir de disserter sur les ambitions présidentielles des uns et des autres.