C’est sûr, ça change de La Rochelle. Cette année, les socialistes ne font pas leur rentrée sous le soleil de la Charente-Maritime. Ils avaient prévu de migrer vers Nantes mais pour - officiellement - des «raisons de sécurité», ils ont annulé. Alors leur patron, Jean-Christophe Cambadélis, a choisi de faire monter ses «cadres» à Paris - «les grognards», précise le premier secrétaire en coulisses - pour deux jours de séminaires dans une salle climatisée de la Maison de la Chimie. C’est plus frais, plus calme. Moins militant. Plus studieux aussi. Ça donne aussi surtout une étrange impression d’un PS bunkerisé à huit mois du premier tour de la présidentielle.
A la veille d'un meeting de rentrée avec plusieurs membres du gouvernement - Manuel Valls compris - sur la question de la «République», Cambadélis a une première cible : Nicolas Sarkozy. Il «a décidé de mener une offensive sans précédent depuis la Deuxième Guerre Mondiale contre les valeurs de la République, attaque le premier secrétaire du PS. Il a décidé de transformer la primaire de la droite en un référendum pour ou contre l'islam, poursuit-il. Ce projet est terrifiant. C'est une remise en cause de notre pacte républicain.» Pour Cambadélis, l'ex-président de la République met sur la table «un vrai programme réactionnaire», «une recentralisation autoritaire autour de l'Etat», une «proximité terrible et une confusion incroyable avec le FN».
En fait le voilà ravi d'avoir enfin un adversaire sur le ring de François Hollande. «La délimitation est aujourd'hui facile à faire, se félicite Cambadélis. Nicolas Sarkozy a emmené la droite à droite mais a dévoilé la véritable nature de celle-ci. Nous ne sommes plus dans le tous contre les socialistes mais dans le choix entre les socialistes et le pacte réactionnaire.» S'il lui attribue un satisfecit sur son refus de légiférer sur le port du voile à la plage, le patron du PS estime qu'Alain Juppé ne vaut pas mieux et qu'il se positionne moins à droite par simple «tactique».
«Clarification»
Alors Cambadélis exhorte les siens à défendre le bilan du gouvernement : la baisse du chômage, la réduction du déficit de la Sécurité sociale… «La bataille sur le bilan, ce n'est pas de la gloriole pour les socialistes, c'est de l'espoir pour les Français», assure-t-il, avant de rappeler que «l'enjeu» de la présidentielle sera de «défendre […] les valeurs de la République sont en danger». Après la polémique sur les arrêtés anti-burkini et la cacophonie au cœur du gouvernement, le risque est quand même là pour les socialistes de subir les débats sur les questions d'identité imposés par le camp d'en face.
Quant à la question de la primaire toujours fixée les 22 et 29 janvier prochains, Cambadélis veut en faire une «manière de surmonter (la) fragmentation» de la gauche. Mais aussi le temps tant attendu par certains de la «clarification». «On ne peut pas dire qu'il y a un danger dans notre République et par ailleurs multiplier les candidatures», avertit-il avant de mettre en garde ceux qui voudraient faire «l'impasse sur la présidentielle, sur les législatives». Et à ceux qui - comme Arnaud Montebourg ou Benoît Hamon - émettent des doutes sur le caractère «loyal» de cette primaire. Il assure : «Ces primaires doivent être loyales, transparentes et permettre au final le rassemblement». Montebourg a déjà dit qu'il ne pourrait pas soutenir Hollande s'il l'emportait. «Croyez moi tout le monde sera dans la primaire, pronostique Cambadélis. Ce n'est pas 200 bureaux de vote de plus ou du moins qui permettront d'en appeler à l'opinion publique et dire qu'on quitte le processus de primaire». Il en termine en rappelant que, selon lui, les socialistes sont «100% républicain», 100% européens, 100% écologistes et 100% progressistes». Fin du discours. Ni Marseillaise, Ni Bella Ciao comme c'était de tradition à La Rochelle. Seulement un «bon retour!» lancé par le premier secrétaire dans l'allée centrale.