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Libération
EDITORIAL

Solitaire

Emmanuel Macron, le 3 juin, à Paris. (Photo Eric Piermont. AFP)
Publié le 30/08/2016 à 20h41

Macron rejoint donc sa micro-entreprise pour tâcher de la faire grandir. L’homme des start-up est cohérent avec lui-même en joignant le geste à la parole, en levant l’ambiguïté transgressive qui a assuré son succès médiatique. Il était aux marches du palais, il est maintenant en marche. Il fallait un talent certain pour passer en moins de deux ans du statut de conseiller important mais inconnu à celui de précandidat présidentiel. Il doit cette ascension météorique à l’espoir de renouveau qu’il a fait naître dans une partie de l’opinion, qui veut des têtes nouvelles et de nouveaux comportements.

La performance est rare dans le jeu politique français, si rétif, au fond, à la franche nouveauté. Mais il la doit aussi à François Hollande, qui a mis sur orbite cet ovni politique qui l’abandonne dans la difficulté. Ce sera le premier obstacle sur la route solitaire d’Emmanuel Macron. Si le Président se présente malgré son actuelle infortune, un Macron candidat endosserait, qu’il le veuille ou non, le costume de Brutus, un rôle que les électeurs goûtent rarement. Il le sait si bien qu’il a soigneusement ménagé son mentor dans sa déclaration de rupture.

Si le Président renonce à se présenter, la voie sera libre. Mais elle restera très étroite. Le libéralisme avenant, mi-social, mi-californien, du jeune ex-ministre, entre droite et gauche, est encore très flou. «Faire bouger les lignes», selon le cliché en vigueur… Encore faut-il dire dans quelle direction. Quand on se place au-dessus du système - louable ambition -, on risque aussi de se retrouver dans les nuages. On passe alors de Brutus à Nimbus. Au gouvernement, quoi qu’il en pense, Macron restait dans la famille de la gauche, qui a besoin de rénovation. Il eût été dans ce cas un trublion utile. Il a décidé de viser plus haut. L’audace est belle et il faut lui rendre justice. A condition de ne pas tirer en l’air.