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Libération
EDITORIAL

Explosive

publié le 2 septembre 2016 à 20h46

Il y a un an, le corps d’Aylan échoué sur une plage turque secouait le monde occidental, faisant crépiter cet étrange sous-continent que l’on appelle les réseaux sociaux. On a alors espéré un réveil des opinions publiques et une réponse des gouvernements à la hauteur d’un drame qui laissait nos démocraties au mieux indifférentes. En Europe, seule Angela Merkel a eu le courage d’assumer une politique à la hauteur d’une tragédie dont les mêmes causes (la guerre et la misère) continuent à produire les mêmes effets (l’exode). La réponse française a été d’une désespérante timidité. En 2015, Paris a accordé la protection à 26 000 demandeurs d’asile. Un chiffre certes en hausse de 20 % par rapport à 2014, mais ridicule si on le compare à l’effort allemand (148 000). En février, Bernard Cazeneuve décidait de raser la moitié de la «jungle» de Calais. Les associations l’avaient alors mis en garde : non seulement cela ne dissuadera pas les migrants de venir s’agglutiner, mais elle risquera de rendre la situation explosive. Six mois plus tard, elle l’est. La population de la jungle a doublé. A cause de la promiscuité, les conditions de sécurité et d’hygiène se sont dégradées. Et, à Calais, l’exaspération gagne de plus en plus d’habitants. Pourtant, le gouvernement n’en démord pas : il veut démanteler (par étape) le reste de la jungle. Sans que l’on sache très bien comment. Pourtant, un autre chemin se dessine. De plus en plus de migrants débarquent à Calais non plus pour traverser le Channel, mais pour déposer une demande d’asile. C’est nouveau. Et encourageant : cela signifie qu’ils sont prêts à quitter la jungle pour s’installer ailleurs en France. Une partie de la solution de Calais réside donc à Paris, où Anne Hidalgo a eu le courage de créer un centre d’hébergement où leurs demandes seront sans doute facilitées. Plutôt que de s’y opposer il y a un an, le gouvernement aurait été inspiré de s’en inspirer.