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Emploi

La menace de fermeture d'Alstom passe au stade politique

La direction du constructeur ferroviaire a annoncé l'arrêt de la production sur son site historique de Belfort. Une méthode jugée «inacceptable» par Valls, tandis que l'opposition critique l'action de Bercy sur ce dossier.
Le site historique du constructeur ferroviaire Alstom, à Belfort, le 7 septembre. (Photo Sébastien Bozon. AFP)
publié le 11 septembre 2016 à 17h55

«Nous avons déjà sauvé Alstom et nous pouvons encore sauver Alstom, à condition que les dirigeants jouent pleinement leur rôle.» Au micro de l'émission le Grand rendez-vous sur Europe 1 (avec i-Télé et les Echos), ce dimanche matin, Manuel Valls, s'est montré particulièrement ferme sur l'explosif et épineux dossier Alstom. «La méthode employée par Alstom est inacceptable. Nous l'avons dit cette semaine aux dirigeants d'Alstom, a ensuite insisté le Premier ministre. […] Tous les jours, nous nous battons pour qu'Alstom gagne des marchés, notamment au plan international et européen.»

Entrevoir une sortie de secours

Depuis l'annonce du constructeur ferroviaire, mercredi, de l'arrêt de la production sur son site historique belfortain, en raison de la baisse du nombre de commandes, l'exécutif tente de se mobiliser pour sauver Alstom, dont l'Etat est actionnaire minoritaire à hauteur de 20% depuis février dernier. Car le transfert de la production de train vers Reichshoffen, en Alsace, d'ici à 2018, fait craindre un nouveau Florange. Jeudi, après avoir reçu le PDG d'Alstom, Henri Poupart-Lafarge, pour lui imposer «une phase de négociations», le ministre de l'Économie, Michel Sapin, et son secrétaire d'État à l'Industrie, Christophe Sirugue, ont ainsi demandé à la direction du groupe ferroviaire «d'engager une phase de discussions et de négociations» avant «toute décision définitive».

Par ailleurs, ce lundi matin, l'Elysée accueillera une réunion interministérielle, autour de François Hollande et de Manuel Valls, en présence du ministre de l'Economie, et des secrétaires d'Etat à l'Industrie, Christophe Sirugue, et aux Transports, Alain Vidalies, pour entrevoir une sortie de secours à la situation d'Alstom. Malgré la stupéfaction et le désarroi des élus locaux tous bords politiques confondus, le constructeur ferroviaire assure cependant qu'il n'y aura ni fermeture de site - une quarantaine de salariés resteraient à Belfort, ni plan social, Alstom s'engageant à soumettre aux 400 salariés concernés «une proposition de transfert, s'ils le souhaitent» vers ses autres usines dans l'Hexagone.

«L’État se réveille bien tardivement»

Maître du dossier jusqu'à sa démission du gouvernement le 30 août dernier, l'ex-ministre de l'Economie Emmanuel Macron a pour sa part réagi samedi en indiquant que l'Etat, bien qu'actionnaire minoritaire, ne pouvait «empêcher» la fermeture du site de Belfort, décidée de façon «brutale» et «inattendue» par l'entreprise. Mais l'ancien ministre est aujourd'hui très critiqué pour sa gestion du dossier Alstom.

Interrogée cet après-midi par le Grand Jury, RTL/le Figaro/LCI, la candidate à la primaire de la droite Nathalie Kosciusko-Morizet, par ailleurs ancienne cadre du groupe industriel, s'en est pris, d'une pierre deux coups, à l'exécutif, puis à la politique de l'ancien locataire de Bercy. «Je voudrais dire que l'Etat se réveille bien tardivement parce qu'en fait, cela fait des années que ça dérive, a estimé l'ex-ministre de l'Ecologie. Il y a eu une opération de sauvetage réussie grâce à Nicolas Sarkozy en 2004 sur Alstom. Et depuis, il y a eu un enchaînement de difficultés, des errements de l'État et du management […]»

Etla députée Les Républicains (LR) de l'Essonne d'ajouter : «Et il faudra qu'on m'explique ce qu'est la politique de Macron vis-à-vis d'Alstom […] parce qu'on nous a expliqué que c'était formidable de remplacer les trains par des cars, et maintenant on s'étonne qu'on ne fabrique plus de trains en France!» Vendredi, en visite à l'usine Ecofit, à Vendôme, Nicolas Sarkozy s'est lui aussi livré à un réquisitoire acerbe de l'action d'Emmanuel Macron. «Quand je pense au ministre de l'Economie, Monsieur Macron, entre sa visite au Puy du Fou, les photos de vacances, et sa démission, imaginez ce que doivent penser les ouvriers d'Alstom à qui il avait promis solennellement qu'il les aiderait et qu'il les sauverait. Il est parti. Il n'a rien fait, c'est désolant», a taclé le candidat à la primaire de la droite. Signe que ce dossier, synonyme de désindustralisation des territoires et de perte d'emplois, s'il s'envenime, risque fort de s'inviter dans la campagne présidentielle.