«On va dans le mur», alerte Christiane Taubira dans l'entretien qu'elle nous a accordé. Ce n'est malheureusement pas une prophétie de mauvais augure, juste un diagnostic lucide. Le train de la déflagration de la gauche roule à tombeau ouvert. Et le pire, c'est qu'il vient de loin. En théorisant sa vision de «deux gauches irréconciliables», Manuel Valls a voulu précipiter la recomposition de sa famille politique. Mais aujourd'hui, il est obligé d'en appeler à une unité qu'il n'a pas cessé de vouloir fracturer. Maintenant deux blocs, de poids presque équivalents (20 % de l'électorat), se font face : un premier qui se dit prêt à assumer le bilan du quinquennat, et un second qui le rejette. François Hollande, plus par faiblesse que par tactique, a laissé le ressentiment de chaque camp se transformer en violence. Si bien qu'aujourd'hui, il faut accueillir chaque tentative de réconciliation comme une raison de ne pas désespérer. Ce week-end, il y en a eu trois. Pierre Laurent, le patron du PCF, a prononcé le mot de «convergence». Les frondeurs ont tenté de ranimer l'idée d'une seule et unique primaire de toute la gauche, de «Macron à Mélenchon», pour éviter la dislocation. Et enfin, Christiane Taubira a le courage de rappeler à ses amis de gauche que non, Sarkozy et Hollande, ce n'est pas la même chose. Oui, ce quinquennat, malgré ses insuffisances, ses échecs et ses lâchetés, est de gauche. Personne ne peut remettre en doute cela quand on regarde la politique fiscale, d'éducation ou de justice de ces dernières années. Ce n'est pas rien puisqu'on parle là du trépied qui soutient notre devise républicaine. C'est-à-dire l'essentiel. Pour engager le débat, il faudrait qu'Arnaud Montebourg et Jean-Luc Mélenchon acceptent de le reconnaître. Sinon, tout le monde sait comment cela va se terminer : le train ira percuter le mur.
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