Quel pays désagréable ! A toutes les certitudes qui occupent le débat français, le Danemark oppose un démenti systématique. Certitudes libérales, telles qu’on les entend chez Sarkozy, Juppé ou Fillon : les dépenses publiques et les impôts qui les accompagnent sont un boulet pour l’économie. Ils plombent ceux que l’Etat obèse est censé aider. Pas de chance : le Danemark est à la fois champion du monde des prélèvements obligatoires et de la lutte contre le chômage. A Copenhague et ailleurs, on s’inquiète aujourd’hui… de la pénurie de main-d’œuvre. Certitude de gauche : la flexibilité du marché du travail esquissée dans la loi El Khomri menace l’emploi et le bien-être des travailleurs. Peut-être, mais pas au Danemark : le marché du travail est flexible, mais les travailleurs sont mieux protégés et formés qu’ailleurs et, surtout, ils trouvent facilement du travail. Certitude de droite et de gauche : la mondialisation nous promet «l’horreur économique» et le déclassement social. Pas au Danemark : ce petit pays est ouvert depuis toujours sur le marché mondial, ce qui ne l’empêche pas de disposer d’un Etat-providence perfectionné. On remarquera enfin que ces bons résultats sociaux n’ont pas empêché l’émergence d’un parti d’extrême droite puissant et influent, ni la présence d’une frange jihadiste dans le pays. Comme quoi la montée du nationalisme ou celle de l’intégrisme musulman ne sont pas le résultat mécanique de l’inégalité et de l’exclusion… On dira que la France n’est pas peuplée de Danois et donc que ces leçons ne sont pas transposables. Ainsi les Danois seraient des sortes de Martiens dont nous n’aurions rien à apprendre. Objection commode : elle évite de réfléchir.
EDITORIAL
Champion
Publié le 15/09/2016 à 20h41
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