A quelques heures du début du procès de la dite «rixe de Sisco», c'est une nouvelle ligne de fracture qui s'ouvre, cette fois à l'intérieur même de la défense des frères B., accusés par le parquet d'être à l'origine des incidents.
Ce matin, la demande de dépaysement déposée par les avocats du barreau de Seine-Saint-Denis qui assurent désormais la défense de Jamal B., l'un des trois frères d'origine marocaine mis en cause, a été rejetée par le procureur général de Bastia. Mes Philippe Ohayon et Ouadie Elhamamouchi, avaient avancé, notamment dans Libération, que le contexte local, entre tensions identitaires, rassemblements de foule et implication des édiles insulaires, nuisait à la «sérénité des débats» et la «sûreté des prévenus».
Une position absolument à l'opposé de celle des avocats corses de Mustapha B., seul prévenu incarcéré dans cette affaire du fait de son lourd casier judiciaire (trafic de stupéfiants, outrages) et de son «rôle moteur» dans la rixe, selon le procureur de Bastia. Mustapha B. – qui, pénalement, risque la plus lourde peine – sera en effet défendu par rien de moins que les deux bâtonniers de l'île : Jean-Sébastien De Casalta, de Bastia, et Jean-François Casalta, venu d'Ajaccio.
Joint par Libération jeudi matin, Me Casalta assure n'avoir encore eu aucun contact avec les quatre avocats franciliens chargés de la défense des deux autres frères B. et considère que «le dépaysement de l'affaire n'a pas lieu d'être». Il en fait même une question de principe : «Cette demande sous-entend que l'on est incapable de juger ce type d'affaire en Corse et jette la suspicion sur tous les avocats insulaires. C'est la raison pour laquelle nous avons décidé de nous déplacer et d'assurer la défense de Mustapha B., pour montrer que les avocats corses sont tout à fait capables de défendre tous les citoyens, quels que soient leurs origines, leurs croyances ou leurs crimes.»
Malgré la décision du procureur général, les avocats de Jamal B. peuvent encore déposer un recours au sujet du dépaysement de l'affaire, qui aurait pour effet quasi automatique de reporter une nouvelle fois le procès. Contacté par Libération pour connaître sa position à ce sujet, Me Ouadie Elhamamouchi n'était pas joignable ce matin.