Des «résistants» : Laurent Wauquiez n'a pas peur du grand écart. C'est la référence qu'a utilisée le président intérimaire de Les Républicains, à la tête de la région Auvergne-Rhône-Alpes, pour désigner les maires qui s'opposeront à l'installation dans leur commune de migrants en provenance de Calais. Après avoir ferraillé hier par médias interposés avec Bernard Cazeneuve, dont le projet de démantèlement de la jungle a été révélé mardi dernier, Laurent Wauquiez a convoqué une conférence de presse de dernière minute, ce jeudi, pour redire son indignation d'avoir «appris à la sauvette» un plan «caché, fait sous la table» sur la question des migrants, fustigeant le «comportement antirépublicain» et le «double discours» du ministre de l'Intérieur.
Laurent Wauquiez a d'abord exigé de ce dernier la «transparence», soit la liste complète des communes concernées dans sa région, ainsi qu'une réunion générale incluant les maires. Il s'agirait, selon son calcul, de multiplier par cinq le nombre de places destinées aux migrants dans les structures d'accueil d'Auvergne-Rhône-Alpes – il en existe aujourd'hui près de 380, l'objectif serait d'atteindre le chiffre de 1 800, pour 8 millions d'habitants.
Il en appelle aux maires
Une «folie», un «appel d'air à l'immigration clandestine» et une incitation à la «multiplication des petits Calais» en France, a asséné Laurent Wauquiez. Après s'être demandé pourquoi la Corse et l'Île-de-France ne sont pas concernées par ce plan – contredisant au passage les récentes déclarations de Valérie Pécresse –, l'homme politique a balayé la question de la répartition régionale : «Notre pays n'a de toute façon pas la capacité d'accueillir ces migrants. D'autant plus qu'on parle de personnes qui ne veulent pas venir en France, mais au Royaume-Uni.»
Alors, afin de rétablir ce qu'il considère comme une vérité, le chef de file LR en appelle aux maires, qu'il dépeint «livrés à eux-mêmes» face à la coercition gouvernementale : «La Région ne les laissera pas seuls. […] J'invite tous les élus à ne pas se faire imposer contre leur volonté ce dispositif. […] L'objectif de ce plan est de cibler les communes rurales où les maires ont peu de moyens juridiques, peu de moyens de pression. C'est d'un cynisme particulièrement choquant.» Mais, affirme-t-il, «les maires ont la possibilité de faire des recours, nous les accompagnerons pour s'opposer». Et d'énumérer les «leviers» que pourra concerner le «conseil juridique» offert par ses services : sécurité urbanistique, organisation de la scolarisation, respect de l'ordre public, de la tranquillité et de la salubrité.
«Le shérif d'Auvergne-Rhône-Alpes»
«Méprisés» par le ministère, les habitants le seraient eux aussi, puisqu'il «n'y a jamais eu aucune concertation». L'homme politique a par ailleurs ponctué son discours d'appels «au bon sens» et au rejet de la logique du «pot de terre contre le pot de fer». Au fait, avant de se proposer de piocher dans les caisses de la région pour soutenir sa campagne anti-migrants, Laurent Wauquiez, à la fois patron de LR et lieutenant du candidat à la primaire Nicolas Sarkozy, a-t-il pensé à consulter les petites gens d'Auvergne-Rhône-Alpes ?
Les élus du groupe socialiste, démocrate, écologiste et apparentés d'Auvergne-Rhône-Alpes se sont indignés, écrivant dans un communiqué de presse : «Non, Laurent Wauquiez n'est pas le shérif d'Auvergne-Rhône-Alpes». Ils ajoutent : «Comme à son habitude, [Laurent Wauquiez] enfile les contrevérités dans le but d'effrayer les habitants et de stigmatiser les réfugiés : qui peut sérieusement considérer qu'installer, par petits groupes, 1 800 personnes dans une région de près de 8 millions d'habitants est impossible ?»