Menu
Libération
Témoignage

Marie Pezé «Le management doit mieux reconnaître le travail accompli»

Marie Pezé, docteure en psychologie, responsable du réseau Souffrance et Travail.
publié le 19 septembre 2016 à 19h31

«Aujourd’hui, soit on confond et oppose travail et emploi, en mettant en concurrence ceux qui n’ont pas de travail et ceux qui ont soi-disant la chance d’en avoir un. Surtout, on n’aborde jamais la question sous l’angle des conditions de travail et des conséquences sur les corps et la psychologie des gens. La rhétorique est économique. Le discours, purement chiffré devient d’une pauvreté terrible. Reste tous les impensés : quelle est la signification du travail, qui reste le plus grand pacificateur social et individuel ? En quoi le travail nous épanouit-il ?

«L’importance de ces questions ne cesse pourtant de se poser, avec un nombre croissant de personnes qui tombent malades à cause d’un travail sans qualité ou exécuté dans des conditions toxiques. Avec, au bout, des suicides de plus en plus nombreux. La santé au travail doit être une priorité. Il faut aussi se pencher sur l’organisation du temps de travail, qui doit laisser plus de place à la vie privée. Aux Etats-Unis, au Canada, dans les pays du Nord, en Angleterre, les journées de travail s’arrêtent à 17 heures : rester plus tard y est signe d’incompétence ! En France, l’accent est mis sur les horaires à rallonge alors qu’on pourrait aller vers une organisation avec peut-être moins de vacances mais avec des journées plus courtes… Le management, lui, doit être moins punitif et mieux reconnaître le travail accompli. On est aussi de plus en plus dans la procéduralisation du travail : reporting, tableaux, contrôle par les nouvelles technologies. C’est éreintant. Les gens ont besoin d’un management de soutien aux difficultés rencontrées dans le travail réel.»