«Honnêtement ? Je ne me sens pas française. Je ne me sens pas française parce qu’on ne m’a jamais considérée comme telle. Je n’aurais jamais cru qu’on en arriverait là… Ces deux dernières années, on nous regarde de travers. Aujourd’hui, quand je marche dans la rue, j’ai peur parce que je suis typée, ça se voit que je suis rebeu. Je ne porte pas le voile, je suis même en petite jupe mais je ressens quand même le racisme. Aujourd’hui, la parole raciste s’est libérée à l’égard de tous les musulmans dans leur ensemble.
«En même temps, je comprends que les gens deviennent racistes à force d’entendre des absurdités comme Jean-Pierre Chevènement qui demande aux musulmans d’être discrets… C’est une blague. C’est quoi être discret ? Quels sont les musulmans qui ne le sont pas ? D’autant plus que la discrétion est essentielle dans l’islam.
«Parler des musulmans comme "la cinquième colonne de Daech", comment on peut dire ça ? Ils nous humilient sans arrêt… Et le burkini, c’est du foutage de gueule. Qu’une femme veuille cacher ses formes, ça la regarde, elle a quand même le droit d’être pudique. En quoi ça dérange ? Ça fait mal aux yeux ? Ça pique ? J’aimerais bien qu’on m’explique. C’est discriminatoire et ça n’a rien à voir avec la laïcité. C’est nous le problème, ils ne veulent pas de nous. La preuve, ils n’ont pas de problème avec les catholiques, les juifs.
«Dans ma famille, j’ai des cousines et des tantes voilées et je peux vous assurer qu’elles l’ont choisi. Il faut bien comprendre que c’est contraire à la religion de forcer les femmes à porter le voile. Bien sûr que parfois le voile ce n’est pas un choix, mais des fois ça l’est, que ça vous plaise ou non.
«Je ne me sens pas libre en France. Elle est où la liberté quand on n’est plus en sécurité ? On est en train de réfléchir avec mon mari à changer de pays, on ne veut pas que notre fils grandisse dans ce climat. Je suis dégoûtée, on a aujourd’hui un gouvernement de gauche qui se comporte comme un gouvernement d’extrême droite… Même si je continue de voter, je n’y crois plus. Je garde toutefois un petit faible pour Mélenchon : j’apprécie son ouverture d’esprit et sa franchise.»