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Libération
Revenu universel

Manuel Valls, les saillies de gauche et le sens du timing

En remettant sur la table le «revenu universel», le Premier ministre procède à un réajustement politique.
Manuel Valls, le 8 septembre à l'Elysée. (Photo Miguel Medina. AFP)
publié le 23 septembre 2016 à 20h21

Oubliez l'été. Oubliez la rentrée. Après avoir fait feu de tout bois sur l'identité et la laïcité ces dernières semaines, Manuel Valls a remis au goût du jour la proposition de créer un revenu minimum universel mercredi. Le timing laisse un poil circonspect. Car le Premier ministre s'était déjà fendu d'une défense de la mesure en avril, en recevant le rapport Sirugue qui prônait une refonte des minima sociaux pour créer une «couverture socle commune». Fin mai, il en avait remis une couche, défendant un revenu universel pour les jeunes, une idée tellement novatrice qu'elle «mettra cinq, dix, quinze ans à se mettre en œuvre».

En réalité, la résurgence du revenu universel est un réajustement politique qui arrive à point nommé pour le chef du gouvernement, dont les embardées sur le burkini ou le voile ont une fois de plus hérissé sa majorité. A l'orée de la primaire de la droite, Valls réactive le clivage droite-gauche puisque son cabinet assure qu'il n'est «pas dans la version libérale du revenu universel qui se substituerait à la protection sociale». Par ailleurs, son plaidoyer est assorti d'une attaque en règle de ceux qui réduisent le système français de minima sociaux à de «l'assistanat». Soit presque tous les candidats de droite.

Pour enfoncer le clou, le Premier ministre peaufine un discours sur le thème de la solidarité pour le mois d'octobre. Mais son entourage réfute tout virage sur l'aile sociale, histoire de revenir aux fondamentaux et de ne plus parler d'identité. «Il parle de tout, tout le temps», assène un conseiller. Le fait que Benoît Hamon ait mis le revenu universel dans son programme pour la primaire a sûrement (aussi) pesé dans l'histoire. «C'est une bataille de quéquettes entre héritiers de Rocard [inventeur du RMI, ndlr], s'énerve un ténor de la majorité. La vraie question qui doit tous nous mobiliser, voire nous angoisser, c'est comment on continue à financer les minima sociaux. Ça, c'est crucial pour 2017 et la suite.» Avant la campagne présidentielle, tout le gouvernement phosphore dans son coin sur d'éventuelles propositions, et Valls ne fait pas exception. «Gouverner jusqu'au bout n'empêche pas de proposer des choses pour la suite et d'armer un futur programme [électoral]», justifie un de ses proches. Il sera bien temps, ensuite, de voir quel candidat le portera.