Bernard Tapie ne renonce pas à intervenir dans le débat public, en dépit de ses démêlés judiciaires. Il revient à ses premières amours, l'emploi des jeunes, sujet dont, dit-il, «tout le monde se branle», en diffusant un mémoire signé de sa pomme et sous la marque Energie radicale – le nom de la liste conduite par Tapie aux européennes de 1994 dont il a manifestement conservé le titre de propriété – surtitré «Il n'y a pas de fatalité». Il y est question de volontarisme, avec ce rappel au «droit d'obtenir un emploi» inscrit dans la Constitution, que la jurisprudence aura tôt fait de traduire en «obligation de moyens», non pas de «résultat». Tapie s'en agace : «Le chômage est toléré comme s'il s'agissait d'une catastrophe naturelle. Si on appliquait le même principe au droit à l'éducation, personne ne saurait lire ou écrire.»
Concrètement, il entend «donner un coup de pied dans la fourmilière» des instituts de formation. Sur 36 milliards d'euros de fonds publics dégagés chaque année à ce titre, un seul est consacré aux chômeurs. Tapie, se permettant de citer saint Matthieu au passage («à celui qui a, il sera donné»), suggère d'en consacrer désormais 40 % aux demandeurs d'emploi (dont la moitié aux jeunes), ces «fainéants» dont il rappelle l'étymologie moins péjorative : «faire néant».
Il propose également de retirer l'agrément de tout institut de formation «qui n'obtiendrait pas le recrutement de la moitié de ses stagiaires dans un délai de six mois». Histoire que ces 36 milliards servent enfin à quelque chose sur le front de l'emploi, et non pas à financer les universités d'été de divers partis politiques, comme le suggère Nanard qui a l'air d'en savoir sur le sujet.
«Au risque de choquer»
Outre le retour aux filières anciennes, comme le compagnonnage, il recommande un rude combat contre le travail au noir avec le recrutement d'une «brigade de 2 000 agents» visant à contrôler les «secteurs suspects» d'emplois dissimulés : restauration, BTP, textile… Et même la mise en place d'une «cellule de dégrisement», une structure de régularisation, à l'instar de celle montée pour les fraudeurs fiscaux. S'agissant des «décrocheurs scolaires» quittant trop tôt l'Education nationale sans le moindre diplôme ni qualification, Tapie recommande, «au risque de choquer», de suspendre les allocations familiales de leurs parents, de mettre l'argent de côté pour constituer un futur «pécule» destiné à ces jeunes sans formation qui accepteraient ensuite une activité manuelle ou associative.
Ce catalogue de mesures, Bernard Tapie le dit destiné «à tous ceux qui voudront le recevoir et le prendre en compte. S'il ne reçoit aucun écho politique, alors seulement [il prendra] les initiatives appropriées». Personne n'imagine un seul instant le mis en examen dans l'affaire Adidas concourir à la présidentielle, mais il prévient les candidats : «Je ne confonds pas le volontarisme avec la fausse énergie mussolinienne du coup de menton.» De qui diable veut-il parler ?